Quel est le lien entre Rita Mitsouko, Killing Joke ou Kraftwerk ? Réponse : Conny Plank, un producteur de génie décédé en 1987. Arte propose un portrait à travers le regard du fils, Stephan.
Stephan Plank, le fils du producteur allemand Conny Plank disparu prématurément en 1987 a l’âge de 47 ans, retrace le chemin de son génie de père en partant à la rencontre de musiciens qui ont travaillé avec le producteur durant sa carrière et transforme ainsi l’essai en voyage initiatique.
Au début des années 70, l’Allemagne développe une scène musicale expérimentale qui débouchera sur l’électronique de Kraftwerk, la kosmisch Musik de Amon Düül 2 ou d’ Harmonia, la motorik proto punk de Neu!. Au centre de cette effervescence : Conny Plank.
Il se fait spécialiste dans l’enregistrement et l’enrobage sonore, n’intervenant en rien sur les compositions. Dans le reportage, Mickaël Rother (Kraftwerk, Neu!, Harmonia) revient de manière attachante sur la personnalité et la manière de travailler de Conny au début des 70’s. On y croise aussi Klaus Meine et son guitariste Rudolf Schenker des germaniques Scorpions, parlant de leur premier album confié à Plank et qui confirmeront son approche sans concession, mais doté d’un humour corrosif. Puis DAF (Robert Görl), et Killing Joke (Jaz Coleman), témoignent de retrouvailles émouvantes avec le fiston.
Le rôle important de l’épouse de Conny, Christa Fast,est admirablement souligné, car comme souvent, elle tenait la boutique pendant que le mari trippait dans le studio avec les musiciens. Au fur et a mesure, le fils nous en apprend un peu plus sur ce père par le témoignage de Holger Czukay (Can) qui livre certaines anecdotes concernant Stephan. Les deux rappeurs Jalil Hutchins et John Fletcher du groupe de rap américain Whodini ou encore Devo décrivent la vie en studio, une ancienne porcherie à Wolperath, et de l’ambiance studieuse et cosmique qui y régnait. Cette localisation champêtre (comme le studio d’Hérouville en France) agissait comme un filtre sur les musiciens borderline ce qui n’était pas pour deplaire au producteur allemand.
Des témoignages poignants comme celui de Fred Chichin de Rita Mitsouko, peu de temps avant sa disparition corroborent le côté imprévu de Plank, qui a produit leur premier mini-album d’où est tiré le hit Marcia Baila. Les années 80 seront pour lui synonymes de succès, l’acquisition de matériels innovant comme le Fairlight, précurseur du Sampler et la démocratisation de la synthèse permettront à Conny de briller avec Gianna Nannini, Ultravox ou Eurythmics tout en rejetant U2. Caractériel sans doute le Conny mais assurément plein de bon sens.
Mathieu Marmillot
Mon père, Conny Plank, révolutionnaire du son à voir et revoir sur arte.tv jusqu’au 31 juillet 2019