Trois ans après Last Night, revoilà le dernier représentant de la scène soul revival apparue à Brooklyn au début des années 2000. Après les départs bien trop précoces de Sharon Jones et Charles Bradley, il nous reste heureusement Little JB.
Lee Fields c’est une âme saine, un p’tit gars de Caroline du Nord qui se rêvait James Brown. Se découvrant un talent pour la musique et une certaine ressemblance avec le Godfather, il tente sa chance dès 17 ans à New York et réussi à vivre de sa musique, mais toujours dans l’ombre des géants de l’époque. Il sortira quand même quelques singles et albums pour différents labels mais qui resteront confidentiels et ne franchiront jamais l’atlantique.
C’est à la fin des années 90 que Bosco Mann (l’autre co-fondateur de Daptone Records) le fait signer sur son label Desco Records. Pour la petite histoire, en 2001 Desco se sépare en 2 labels distincts, le premier Daptone deviendra célèbre dans le monde entier grâce à ses têtes d’affiches Sharon Jones et Charles Bradley, le second, Soul Fire gardera Lee Fields qui deviendra sa principale vedette.
Depuis 2002, Lee Fields s’est associé à Leon Michels (le saxophoniste du Menahan Street Band) pour produire ses différents albums, et on peut dire que cela a été une réussite. En 2002 Problems, 2009 My World, 2012 Faithfull Man, 2014 Emma Jean, 2016 Last Night, et à chacun de ses disques une tournée internationale a suivie. L’Europe et plus particulièrement la France (qui depuis plus d’un siècle aime célébrer les musiciens afro-américains), a droit à ses concerts dans des salles ou des festivals toujours plus importants. Si vous ne l’avez jamais vu dans ses fameux costumes à paillettes emballer les foules, c’est un tort à vite réparer cette année.
Car à 68 ans cet infatigable show-man sort un nouvel album, le 6eme depuis 2002 et évidemment toujours sous la houlette de Leon Michels et accompagné de son groupe The Expressions. Il s’agit d’ It Rains love, un album qui traite peut-être encore plus de la foi que les précédents, pour cet homme pieux et marié à la même femme depuis plus de 40 ans, une femme qu’il ne cesse de remercier comme avec le single éponyme extrait de l’album It Rains Love.
Lee Fields a besoin de partager son bonheur, son amour, sa positivité avec les autres, au travers de la musique, un moyen d’expression qu’il maîtrise parfaitement. Certainement des restes de son enfance bercée au gospel dans sa petite église de quartier !
Il dit lui-même que les chansons actuelles (notamment dans le rap) abordent des sujets controversés et ont des paroles à ne pas mettre dans toutes les oreilles et que c’est pour cela qu’il ressent le besoin de faire des chansons positives.
Il dit également avoir beaucoup de respect pour les rappeurs, (l’inverse étant également vrai, certains allant jusqu’à le sampler comme J Dilla, A$AP Rocky ou dernièrement Travis Scott pour son morceau Antidote), mais que ses principes lui interdisent la vulgarité qui est devenue la norme dans les chansons actuelles.
Dans cet album donc on trouve donc beaucoup d’amour enveloppé par les beats Deep Funk de ses musiciens, les cuivres, l’orgue Hammond… et surtout des textes positifs et encourageants comme Will I gest off easy, d’autres qui parlent d’amour conjugal comme You’re what needed in my life ou Love prisoner, et forcément aussi un peu de sa foi avec God is real.
On trouve aussi une tentative de modernisation musicale avec des beats un peu trop synthétiques à mon gout sur Two Faces, alors certes cet album ne révolutionne pas le genre, mais il nous permet de ne pas perdre le fil conducteur de la carrière de ce formidable soulman, et surtout nous permettra de le retrouver sur nos scènes en 2019 et 2020.
Arnold PIJOT