Avec leur huitième album, I Am Easy To Find, The National continue de diluer toute l’originalité qui faisait le sel des grands disques de la bande de Cincinnati. Analyse d’un échec.
Il commence à paraître loin le temps où l’on ouvrait avec un empressement non-feint le cellophane qui recouvrait les nouvelles pépites d’un disque de The National. On l’a aimé la bande à Matt Berninger et aux frères Dessner mais sans doute comme il convient aux artistes que l’on chérit, on ne supporte pas chez eux la facilité que l’on rapproche immanquablement d’une certaine paresse. Et si le dernier grand disque de The National était High Violet qui remonte déjà à 2010 ?
Pourtant avec I’m easy to find, The National tente de se réinventer et de s’éloigner un peu de ses recettes habituelles, les longues cavalcades rythmiques (un peu convenues) et les balades sépulcrales portées par un Matt Berninger chuchotant de sa voix caverneuse. A la base de ce disque, il y a une rencontre, celle avec le metteur en scène Mike Mills (créateur de 20th Century Women avec entre autres Greta Gerwig et Annette Benning). Le réalisateur propose à The National de mettre en musique son court-métrage, I Am Easy to Find, racontant le long apprentissage d’une jeune femme toute sa vie durant.
Ce n’est pas l’apport des nombreuses voix féminines (nécessaires à la narration de ce projet) qui apporte quoique ce soit de neuf dans les lignes prévisibles des auteurs de Fake Empire. Elles font pourtant beaucoup pour tirer ces chansons vers le haut, Gail Ann Dorsey, Sharon Van Etten, Lisa Hannigan, This Is the Kit et Mina Tindle mais rien n’y fait. Tout semble tourner à vide entre panne d’inspiration et redite absolue. Comment a-t-on pu être aussi passionnant sur l’EP Cherry Tree (2004), Alligator (2005) ou Boxer (2007) et perdre à ce point tout ce qui faisait les fondations d’une originalité associée à une efficacité sans cesse renouvelée ?
A trop vouloir travailler leur pendant Pop, The National en a oublié la rage qui se distillait dans Abel ou dans les entre-lignes de Guest Room pour ne garder que l’amertume. L’auditeur se ballade ici dans un entre-deux inconfortable entre ennui et pitié. Néanmoins, on est bien conscient que rien n’est perdu pour The National car le plus patient y entendra des arrangements riches sans doute concoctés par Bryce Dessner.
Clogs, le projet parallèle qu’entrenait Bryce Dessner avec Padma Newsome nourrissait sans aucun doute les disques de The National, des sessions de création avec ce projet, il puisait une certaine originalité qui le plaçait dans une espèce de chaînon manquant entre l’école minimale, le folk et la pop. Depuis quelques années, le guitariste de The National travaille de plus en plus le terrain de la musique contemporaine, la preuve avec le récent spectacle avec Thom Yorke et David Chalmin. The National ne profiterait-il plus des expériences de son compositeur en chef ? Au contraire, I’m easy to find laisse couler une matière sans saveur et sans enjeu. La faute à un refus de la concision, avec seize titres dont la moitié peut sembler accessoire. La faute à la redite qui ne tient pas la comparaison face à l’original (Not In Kansas face à I Need My Girl), un discours qui passe du coq à l’âne entre manque de cohérence et d’humilité. On a également cette désagréable impression d’écouter un disque cannibalisé par la présence d’autres artistes. Certains titres (So Far So Fast) semblent être totalement appropriés par les invités mais aucune magie n’en ressort pour autant.
On a longtemps craint pour The National le disque virage grand public à l’image d’un U2 ou d’un Coldplay qui n’entretiendrait qu’une formule lisse et sans saveur, une recette sans aspérité ni identité propre. Nos effrois par procuration sont largement dépassées. I’m easy to find n’est en aucun cas une oeuvre plus accessible, plus pop ou plus ouverte à un plus large public. C’est juste un disque à l’ennui contagieux. et c’est peut-être pire…
Greg Bod
Critique totalement injuste et imbécile…
High violet en 2010 était un sommet, puis le groupe ronronnait, tournait en rond. Et donc 9 ans après, voici un nouveau disque passionnant, renouvellements nombreux (longueur envoûtante, pointes électro, voix féminines). En découvrant titre après titre, j’ai été séduit par la diversité des univers, la palette des couleurs faisant apparaître des paysages sonores et visuels !!
Bref, une bouffée d’objectivité ne vous aurait pas fait de mal…
Je ne sais pas quelle mouche vous a piqué pour écrire tant d’inepties !!
Ce disque restera dans la discographie de The National comme une perle, inespérée, une magnifique surprise, fraîche, ouverte faisant penser aux grands espaces de l’ouest américain tout en convocant l’intime.