Le trompettiste Etienne Sevet prolonge encore une fois ses dérives afro-caribéennes avec le second disque de The Bongo Hop, entre Port au Prince et Lagos, basculant de la cumbia à la samba angolaise, entre envie de voyage et danse.
La vie et le destin tiennent à peu de choses. Celle d’Etienne Sevet a été changé par la découverte d’un continent, l’Amérique du Sud. Journaliste de métier et urbaniste de formation, il part en Colombie sur les traces du chanteur de salsa portoricain Hector Lavoe, il en reviendra avec une connaissance profonde de la culture d’Amérique latine.
Satingarona Pt 1 sera l’illustration sonore d’un carnet de voyages. De retour en France après plusieurs années expatrié du côté de Cali, il retrouve au fond de son grenier une vieille trompette poussiéreuse que lui avait offert sa grand-mère il y a tellement longtemps qu’il l’avait presqu’oubliée. Dès les premières notes lancées, Etienne Sevet retranscrit les émotions ressenties dans ses voyages sur les routes poussiéreuses, dans ces villages au milieu de nul part. Conseillé et épaulé par Quantic, le monsieur tente l’expérience d’un premier disque avec des compositions totalement originales et ressemblant en bien des points à un métissage de plusieurs cultures. Rien que le titre des deux disques donne quelques indices, Satingarona, la rivière Satinga en Colombie et la Garonne dont le trompettiste est originaire. De là à dire que la musique de The Bongo Hop, par-delà la seule volonté dansante, tend vers l’universalité, il n’y a qu’un pas que nous nous empressons de franchir. Un exotisme qui doit autant à ses références qu’à l’assimilation qu’en fait le français.
Bien sûr, cher amateur de musique indie, tu ne résistes pas toujours à ces idées préconçues sur les musiques du monde. Pourtant sache que ce soit du côté du Mayola comme de la musique créole ou des terres afro-caribéennes, il y a encore bien des joyaux à découvrir. Bien sûr, face à de telles immensités, il faut bien des guides pour y trouver son chemin, Etienne Sevet se pose là en conteur pédagogue et en passionné. Pour preuve La Carga et sa cumbia alanguie. Au départ de cette chanson, le souvenir raconté un soir par Chris Kirkley de Sahel Sounds qui eut la surprise de découvrir à son réveil au petit matin la carcasse brûlée d’un petit avion vénézuélien… De cette anecdote sibylline et mystérieuse, Sevet tisse une rythmique Gnawa qui s’acoquine aux rivages de Colombie.
Avec The Bongo Hop, on passe allègrement d’un continent à un autre comme si on portait les bottes de sept lieues du fameux conte. N’hésitant pas à pousser le brassage vers une collision entre Hip Hop et musique latine, Etienne Sevet est encore une fois bien entouré. On citera Nidia Gongora, chanteuse d’Ondatropica et Quantic, et du producteur multi-instrumentiste Patchworks mais aussi la divine Cindy Pooch. On citera également le MC antillais Greg Frite, Kephny Eliacin et Laurène Pierre-Magnani.
Satingarona Pt 2 n’est en rien une répétition de son aîné mais plutôt une prolongation voire une extension géographique, allant piocher du côté du continent africain mais aussi d’un jazz solaire. D’une belle sophistication, la musique d’Etienne Sevet n’est jamais seulement radieuse mais sait instiller une belle mélancolie insidieuse.
En ses temps où la volonté serait plus au replis sur soi, la musique de The Bongo Hop avec sa volonté d’ouverture d’esprit (qui n’est pas une fracture du crâne) est plus que jamais nécessaire.
Greg Bod