Seconde saison pour American Gods, la série la plus ambitieuse diffusée par Amazon Prime. Avec la répétition des mêmes problèmes que pour la première : pour une série qui fait ainsi du sur-place, on se pose forcément la question de ce qui nous y attache…
On sait que American Gods, lancée par Amazon Prime pour devenir son vaisseau amiral et ayant échoué à créer le buzz et à rejoindre le peloton de tête des grandes séries dont on parle, est en crise profonde. Départ des showrunners, de scénaristes et même d’acteurs, incertitude visible quant à la direction à donner à la série et donc à positionner cette seconde saison dans une trajectoire narrative (et ce malgré la participation de Neil Gaiman, l’auteur du roman, à l’opération…!), cette grosse pagaille est clairement lisible dans le résultat : finalement, cette seconde saison ne nous propose aucune évolution notable de l’histoire, ce qui est quand même un comble avec 8 épisodes d’une heure. Un peu comme si le fameux « Winter is Coming » de Game of Thrones devenait un « War Is Coming », une guerre qui semble bien ne devoir jamais arriver !
Autre problème de taille, cette insistance à produire de la belle image (enfin quand la CGI n’est pas trop défaillante…) sans se soucier le moins du monde de son sens. Pour une publicité, c’est très bien, pour une œuvre cinématographique (car, même au format TV, il s’agit bien de ça…), c’est beaucoup plus frustrant, voire même irritant. Et cela n’aide pas la crédibilité d’une série qui nous ballade un peu n’importe où à coup de scènes bluffantes mais vides, ou de nouveaux concepts complexes qui s’accumulent tout-à-fait gratuitement sur une intrigue qui de toute manière n’avance quasiment pas…
Ce qui nous amène à la seule manière d’apprécier franchement American Gods : ne plus se préoccuper de l’histoire qu’elle tente de raconter – cette fameuse tentative de retour des vieilles divinités qui ont été oubliées du fait de notre addiction au Net, aux médias en général, à la célébrité – pour seulement savourer le plaisir que nous offrent les acteurs, certes cabotinant un maximum, avec une belle générosité. Ne revenons pas cette fois sur le travail épatant de Ian McShane (certains de ses monologues auraient été purement et simplement improvisés du fait de la déficience des scénaristes !), mais soulignons dans cette seconde saison l’impact émotionnel du jeu de Pablo Schreiber, régulièrement flamboyant – et nous ne parlons pas que de la couleur de ses cheveux ! – dans son rôle de leprechaun qui se révèlera un prince celte ayant sombré, emporté sa haine du clergé chrétien colonisant l’Irlande.
Ce talent de bons acteurs (même s’il est évidemment dommage que Ricky Whittle, en charge du personnage central de Shadow Moon, soit quant à lui aussi peu convaincant !) faisant tout leur possible pour tirer vers le haut une série handicapée par ses faiblesses d’écriture, est bel et bien la meilleure raison du monde de continuer d’être fidèle à American Gods !
Eric Debarnot