Avec ses 79 années au compteur, dont presque autant à chanter, Mavis Staples revient avec We Get By, un 12e album aussi militant qu’attachant, produit par Ben Harper.
Mavis Staples est une icône de la musique Soul, et une des dernières représentantes de l’âge d’or de cette musique à l’époque où le combat pour les droits des afro-américains et des minorités aux Etats-Unis prenait de l’importance. Elle était une des voix des Staples Singers, ce groupe familial de gospel fondé à Chicago en 1948 par son père « Pops » et dans lequel officiaient Mavis, ses sœurs Cléotha et Yvonne (aujourd’hui décédées) et son frère Pervis.
La liste des stars de la musique qui ont travaillé avec elle est trop longue pour en parler ici, mais on peut juste dire que cela va par exemple de Bob Dylan à Prince en passant par Arcade Fire et Ray Charles. Elle a chanté pour Martin Luther King en 1965, ainsi que pour divers présidents, allant de JF Kennedy à Barrack Obama, preuve en est qu’elle a su traverser les époques et les modes sans jamais perdre son âme. A bientôt 80 ans, elle bénéficie toujours d’une énorme cote de popularité auprès des amateurs de musique Soul et son engagement pour l’injustice n’a pas faibli, c’est une militante confirmée avec pour seule arme sa voix.
Depuis une dizaine d’années elle enchaîne les albums avec le même trio de musiciens, (guitare/basse/batterie), changeant uniquement de producteur, et ce sans jamais perdre en qualité, la raison de son succès étant simplement son authenticité.
Ce coup-ci, l’heureux élu est Ben Harper, et on se doute qu’il a grandi en écoutant The Staples Singers tant il a su cerner l’esprit « Staples ». L’alchimie fonctionne, Ben a tout écrit et produit, pour faire un album blues, rock and soul à la hauteur de la dame, comme en témoigne l’émouvant Change, un appel à un changement de mentalité nécessaire aux USA, l’excitant Anytime, le militant Brothers and Sisters, le bluesy Chance on me ou l’euphorisant gospel Sometime, fidèle aux origines de Mavis.
On notera la sobriété de certains morceaux qui permettent au chant d’exprimer toute son émotion comme dans ces 3 titres : Hard To Leave, Heavy On My Mind ou Never Needed Anyone. Avant que l’album ne se termine, notre bluesman californien s’offre même le luxe de chanter en duo sur We Get By, pour encore 3 minutes de pure émotion à savourer.
Mavis a fait tellement d’excellents disques qu’il est difficile de les classer. Celui-ci est très bien, mais sans réelle surprise, comme les autres finalement… car Mavis y fait ce qu’elle sait faire le mieux, du Staples. Pour vraiment apprécier l’émotion que dégage cette presque nonagénaire, et découvrir un panaché de sa carrière et de ses influences, il faut l’écouter en live, et pour cela, on conseillera plutôt à choisir le très bel album Live in London sorti en février de cette année, voire même carrément d’aller à son prochain concert parisien à La Cigale le 5 juillet prochain.
Arnold PIJOT