Connaissez-vous ce drôle de chien, prénommé Buck, qui n’est bien que dans sa niche, au point d’avoir fusionné avec elle ?… Une tranche de vie canidée pleine de poésie et de tendresse.
Buck, le chien qui reste cloîtré dans sa niche, a peur de tout. Depuis toujours, il craint les nuages noirs, les rafales de vent, et plus que tout, sa propre ombre ! Pour Buck, qu’il y ait du soleil ou de l’orage, du vent ou de la pluie, il fera toujours un temps à ne pas mettre un chien dehors !
Après son aventure extraordinaire dans la mythologie scandinave, Buck le chien-niche est de retour ! On ne sait pas si Adrien Demont est fasciné par les chiens ou les niches, ou les deux à la fois. La réponse se trouve peut-être dans cet aphorisme en fin d’album : « Ne dit-on pas que le chien est le seul animal qui loge dans son anagramme ? »… Ainsi l’auteur reprend son singulier personnage pour ce qui s’annonce être une série, mais sous une perspective très différente. Tout d’abord, ce n’est pas vraiment une suite, et on peut supposer que, chronologiquement parlant, cela se passe avant La Nuit des trolls. Dans un format à l’italienne, l’histoire, sans paroles, est centrée uniquement autour de Buck, présent dans chaque case.
Contrairement à l’album précité, déjà pour le moins atypique mais comportant un scénario bien construit, l’auteur semble ici avoir laissé libre court à son imagination débridée, en accompagnant sa drôle de créature hybride à travers un monde plein de périls plus ou moins avérés. Car le jeune Buck, on le sait, est peureux. Ce chien inquiet n’a jamais voulu parcourir le monde ni quitter de sa niche… Ainsi, le jour où celle-ci est emportée par une tempête, il va se retrouver livré à lui-même…
Réalisé dans un joli monochrome sépia, le dessin, toujours aussi magnifique, s’impose donc comme la clé de voûte de ce petit album. Extrêmement minutieux, le trait est un plaisir des yeux et dépeint un univers champêtre avenant, à mille lieues des inquiétantes forêts scandinaves de l’opus précédent, où les trolls terrifiants semblaient constamment en embuscade. Le tout donne lieu à nombre de gags très fantaisistes auxquels on ne rit pas forcément de façon spontanée, mais qui seraient plutôt des gags à retardement, d’autant plus drôles… En effet, il faudra sans doute au préalable bien observer les cases pour saisir toute la finesse d’un humour lunaire et d’une grande poésie, si bien qu’on se demande si l’objet ne s’adresse pas autant aux adultes qu’aux enfants.
Cela vaut vraiment la peine de faire plus ample connaissance avec ce drôle de Chien perdu, dont la niche intrigue et ne se révèle pas au premier venu. De l’extérieur, elle semble étroite mais quand on prend la peine d’en franchir l’entrée, elle devient étonnement beaucoup plus grande… Laissez-vous séduire par l’univers charmant et intemporel d’Adrien Demont, qui, plutôt que le clinquant si caractéristique de certaines productions animalières actuelles, préfère jouer les ambiances désuètes et cosy des vieux contes nordiques, et ce pour notre plus grand plaisir.
Laurent Proudhon
Buck, tome 1 : Le Chien perdu
Scénario & dessin : Adrien Demont
Editeur : Soleil
Collection : Métamorphose
64 pages – 13,95 €
Parution : 29 mai 2019