Après trois Mixtapes (dont la première: celle qui nous occupe aujourd’hui) et seulement deux albums studios, l’étoile filante d’un Rap East Coast renaissant tire sa révérence en ce début 2019 dans un grand « FUCK » retentissant. De quoi se replonger dans la courte, mais intense, carrière du gamin de Brooklyn. BADASS !
Il est de ces albums (ou mixtape en l’occurrence) dont on n’attend rien. Des albums que l’on visite comme ces petits musées de ville de province, distraitement, parce que l’on que ça à branler et que tout les bars sont fermés.
Une oreille blasée qui court sur du streaming musical et tout à coup la claque ! Un retour en arrière.
Des converse qui raclent sur le bitume New Yorkais, des vendeurs de hot-dogs aux tabliers crasseux et des bouches d’égouts fumantes, donnant un air surnaturel aux avenues trop éclairées.
Mes oreilles dessinent un New-York 90’s.
Des samples funky, Jazzy. Un flow souple comme en liberté, des passes de scratchs présentes mais légères, aériennes, soulignant le propos avec finesse.
Mes oreilles de non-initiés dessinent Nas involontairement avec ces beats qui font bouger la tête gentiment et te filent un sourire niais de témoin de Jéhovah.
Mais foin de Nas !
Ça empeste les nineties à plein nez et pourtant.
Les ombres de Nas, Jay-Z, Mobb Deep ou Notorious B.I.G. ont beau venir te taper sur l’épaule et te proposer leur oinj le sourire en coin, tes esgourdes ne sont pas dupes.
Les effluves de ton bédo sentent fort le milieu des années 90 mais la taff vient d’être tirée à l’instant.
Une grosse bouffée tirée par un gamin de 17 ans. Une tête de con avec un charisme qui lui transpire sous les bras et une classe démentielle.
Un petit gars de Brooklyn né en 1995 et qui a débuté dans le Hip-Hop en 2010; quinze années tranquillosse avant d’attaquer dans le Rap underground comme un chien enragé, avec l’énergie débordante et créatrice de la jeunesse et un talent hors-norme.
1999 première mixtape du petit génie, nommée pour l’award 2012 de la meilleure mixtape et véritable coup de maître.
Bada$$ et son collectif Progressive Era viennent invoquer les glorieux ancêtres et fondent ce « New Old School sound ». Un son qui caresse les nineties, qui les pétrit, qui les remodèle.
Un son qui se pare des plus beaux effets de la grande tradition de l’East Coast mais dont la prod’ fine, claire et racée prouvent que l’on a bel et bien changé de siècle.
Pas de Bling-Bling, pas de Gansta Rap ou de RnB fadasse dans cet opus, mais du Rap, juste du Rap.
Un Hip-Hop nerveux et sans concessions. C’est la jeunesse, à nouveau cette jeunesse New Yorkaise qui s’empare de ce style né dans ses propres rues.
Un Rap de gamin, des mômes qui déblatèrent en total égo trip leur mal-être, leurs plan foireux et leurs petits bonheurs. Un lycéen surdoué qui relègue quelques adultes, quelques pros du mic’ sur les bancs de l’école primaire.
Joey Bada$$ gamin sauvage, fouteur de merde et ingérable; mais élève hautain et surdoué, passe haut la main dans la classe supérieure avec cet opus classieux et hypnotique.
Une rêverie nostalgique aux sources de l’East Coast, les deux pieds bien ancrés dans le bitume froid du XXIe siècle.
Une réussite.
Renaud ZBN