Pierre Christin et Sébastien Verdier nous proposent une très belle biographie de l’auteur de 1984, tour à tour journaliste socialiste, volontaire antifranquiste et père d’une science-fiction dystropique et prophétique.
Georges Orwell est brave, généreux et lucide… Or, si l’auteur de 1984 et de La Ferme des animaux est célébré, l’homme est méconnu. Pierre Christin aime Orwell et nous fait partager son admiration. On découvre ainsi ce fils de petit fonctionnaire qui intègre, comme boursier, le prestigieux Eton. Le très élitiste système britannique sélectionne sur le sang et l’argent, tout en réservant des places aux élèves brillants et disciplinés. Orwell en gardera une diction parfaite et une aversion pour les impérialistes. Refusant de poursuivre à la fac, il est officier de police en Birmanie, puis démissionne pour mener une vie de marginal, à la rencontre des plus pauvres. Il écrit, sans succès. Le militant socialiste combat les franquistes dans les rangs anarchistes. Grièvement blessé, il échappe de peu aux Soviétiques qui exécutent ses amis anarchistes du Poum. Le journaliste perce enfin.
Le scénario réserve une belle place à ses citations. Révolté, il déteste les aristocrates britanniques, mais hait plus encore Hitler et Staline… Ce conservateur anarchiste – il assume l’oxymore – ne croit qu’en l’homme et célèbre la common decency des gens du peuple, ce refus spontané de l’injustice qui fonde toute vie en société.Le personnage est beau. Peut-être trop. L’album frise l’hagiographie. Plus grave, le récit pèche par sa linéarité et son absence de scènes fortes. L’auteur de Valérian nous avait habitués à plus d’audace. Sébastien Verdier dessine bien, mais sagement. Sa fantaisie se limite à quelques aplats de couleurs dans ses planches en noir et blanc. Plus original, de grands auteurs signent quelques cases. Saurez-vous les reconnaître ? Orwell méritait plus de de folie.
Ann. : Pour le plaisir, le visionnaire Orwell avait anticipé les méfait du Marvel Universe : « Qui pourrait sans crainte élever un enfant en lui donnant à lire ces comics en couleurs où l’on voit d’inquiétant savants fabriquer des bombes atomiques dans des laboratoires secrets pendant que Superman file à travers les nuages, les balles de mitrailleuses ricochant sur sa poitrine comme des petits pois, ou encore des blondes platinées se faire violer, ou presque, par des robots en acier et des dinosaures de quinze mètres de long ? »
Stéphane de Boysson
Orwell
Scénario : Pierre Christin
Dessin : Sébastien Verdier
Éditeur : Dargaud
160 pages – 19,99 €
Parution : 14 juin 2019