Après Vivianne Elizabeth Fauville (2012) Le triangle d’hiver (2014) et Sygma (2017), Julia Deck publie chez Minuit Propriété privée, un roman en forme de jeu de massacre dans une banlieue pavillonnaire. A la fois drôle et effrayant.
Tout commençait plutôt bien pour le couple Caradec qui venait d’acquérir une maison au top de la modernité écologique, une construction peu énergivore, chauffée avec des panneaux solaires et recyclage automatique des ordures et un bac à compost. Mais les choses commencent à se gâter quand ils découvrent que le voisinage n’est pas aussi tranquille qu’ils l’imaginaient. En effet Annabelle Lecocq, la voisine sans gène se montre très vite intrusive et vient perturber un quotidien qui s’annonçait pourtant radieux dans cette petite banlieue façon Wisteria Lane dans Desperate Housewives.
Résultat, les gens s’épient, se toisent, se critiquent. Des clans se forment d’autant plus depuis que le gros chat roux des Lecoq a été retrouvé mort éventré. La police est prévenue mais elle a forcément d’autres chats à fouetter. Les disputes, les adultères, les petits secrets, les travaux de terrassement bruyants, les soirées barbecue auxquelles on n’est pas invité… la jalousie et les rancœurs règnent en maître dans cet écoquartier, et vous comprendrez alors aisément que la vie devienne invivable pour Eva et Charles… d’autant plus qu’un membre de cette petite communauté (pas vraiment fraternelle) disparaît soudainement… et petit à partit la satire sociale prend alors des allures de thriller.
Avec Propriété privée, Julia Deck envoie un message en forme de clin d’oeil à ceux qui pensent qu’on trouve la calme et la tranquillité loin du bruit et de la pollution des villes, et que les voisins sont tous des gens sympathiques sur qui l’on peut toujours compter.
Ecrit à la 2e personne du singulier par la narratrice – qui s’adresse tout au long du livre à son mari dépressif, – ce roman bien singulier dans sa tournure, au style à la fois facile et travaillée offre un très bon moment de lecture avec un récit mordant, à la fois drôle et inquiétant, à la méchanceté par moment assez jubilatoire, qui pourra évoquer certains romans de Philippe Djian.
Benoit RICHARD