Stephen King inadaptable ? C’est devenu une banalité que de déplorer les difficultés du cinéma à transformer les visions du « maître de Bangor » sous forme cinématographique, et ce n’est pas Dans les Hautes Herbes, la toute dernière production Netflix, qui changera grand-chose…
Décidément, adapter au cinéma Stephen King est une véritable gageure, et sur les dizaines et dizaines de films tirés de l’oeuvre pléthorique de celui qui est devenu le plus grand écrivain fantastique américain (et sans doute « global ») du 20ème siècle, on peine à sauver une poignée de bons films – les adaptations de cinéastes notables comme Carpenter (Christine), De Palma (Carrie), Darabont (The Mist) et, très récemment, Flanagan (Jessie), ou le chef d’oeuvre de l’irremplaçable génie que fut notre cher Kubrick (Shining). Sans atteindre le désastre absolu qu’a pu représenter l’effroyable diptyque ça, il faut bien reconnaître que Dans les Hautes Herbes, conduit sans grande imagination par le tâcheron des séries B Vincenzo Natali, ne marquera pas l’histoire du cinéma, et aura même bien de la peine à animer une banale « soirée Netflix / canapé ».
Alors que les adaptations des livres volumineux du maître de Bangor sont en général pénalisées par la difficulté matérielle de résumer les thèmes complexes et les ramifications sociales ou psychologiques de ses intrigues, c’est à l’inverse l’épure ultra-efficace qui constitue l’art de la nouvelle « à la King » qui ne saurait nourrir un film ambitionnant d’atteindre la barre des 1h45 : on se demande bien pourquoi d’ailleurs Netflix n’aurait pas pu se contenter d’un métrage de 1h15, qui aurait été bien plus approprié au contenu du scénario étique de Dans les Hautes Herbes (six personnes et un chien perdues dans un champ « maléfique », point final)… Le résultat était d’ailleurs tristement prévisible,après trois quarts d’heure plaisants, plutôt bien filmés – la mise en scène de Natali est assez inventive pour rendre spectaculaire la vision de ce labyrinthe d’herbes mouvantes, et nous faire partager la claustrophobie et l’angoisse des protagonistes -, notre attention se détache peu à peu d’une intrigue qui bégaie, qui se complexifie inutilement, et qui multiplie les sujets : entre la révélation de la part obscure de chacun – thème « kingien » s’il en est, mais quand même assez banal ici – donnant lieu à des excès de violence gore, les paradoxes temporels et les références à d’obscures divinités païennes, le film ne choisit pas, et mélange le tout dans ce qui se transforme peu à peu en gloubi-boulga indigeste.
Alors que la partie « psychologique » du film est pénalisée par des acteurs peu convaincants, mal dirigés, et par le fait que les boucles temporelles nous rendent relativement indifférents quant au sort de personnages condamnés à mourir et revivre cycliquement, la partie « science-fiction » n’apporte guère plus de satisfaction, la solution apportée pour rompre le dit « cycle » n’est guère cohérente et traduit la légèreté de l’écriture : le film se conclura donc sur un sentiment de « WTF » désabusé. Et ne laissera dans nos mémoires que le sentiment nauséeux d’une autre soirée perdue devant Netflix.
Mon cher Eric, je crois que tu m’as fait gagner du temps… je voulais regarder la fin parce que je trouvais que ça commençait plutôt pas mal, mais là, plus trop envie… sinon quand tu cites les adaptations réussies de King, tu oublies « Misery » avec la grande Kathy Bates, et là, ça va pas du tout !!! ;-)