Tragi-comédie « de remariage », sous la forme d’une fantaisie théâtrale, Chambre 212 interroge en son sein le couple, en mettant à nu de façon vivifiante : la fidélité, le poids des ans, le désir amoureux et la sexualité.
Après plus de vingt ans de mariage, Richard mari amoureux découvre au hasard de messages l’infidélité chronique de Maria sa femme bien-aimée. Une dispute éclate, remettant ainsi à plat toute leur histoire commune. Maria décide sur un coup de tête de quitter l’appartement pour la nuit, et de traverser la rue pour loger dans l’hôtel situé sur le trottoir d’en face afin de faire le point sur l’avenir de leur couple.
Christophe Honoré livre une élégante mise en scène en huis clos par le biais de saynètes décalées qui permettent d’illustrer au mieux, à travers une écriture moderne, romanesque, malicieuse et tendre, chacune des situations agrémentées de déroutants effets de miroirs, entre portes et fenêtres vers le passé, au cours d’une nuit fantasmagorique.
Une délicieuse œuvre poétique et surréaliste qui convoque avec gourmandise le cinéma de Bertrand Blier, celui d’Alain Resnais et de Woody Allen, et nous invite également dans sa cinéphilie personnelle par de multiples références (cinéma 7 parnassiens, clin d’œil par le biais d’affiches à François Ozon…).
Christophe Honoré utilise comme à l’accoutumée sa particularité musicale avec des titres de Charles Aznavour, Jean Ferrat, Scarlatti notamment, pour ponctuer avec acuité la résonance des maux et laisser ainsi libre court à la respiration des multiples émotions.
Une lumineuse comédie d’introspection douce-amère magnifiée par la rayonnante, libre et émouvante Chiara Mastroianni (récompensée par le Prix d’interprétation féminine dans la section Un Certain regard du Festival de Cannes 2019) bien accompagnée par les impeccables Vincent Lacoste et Benjamin Biolay (interprètes du mari aux deux âges différents) et la touchante Camille Cottin. Chambre 212 fait vibrer notre intime, où les regrets se mêlent aux souvenirs de l’amour naissant avec une frénésie émoustillante et une sensibilité désarmante.
Venez donc déguster à l’autel d’Honoré ces savoureuses confessions conjugales dont les nombreux ressorts intimes interpellent la fin de nos propres histoires d’amour déchues. Audacieux. Profond. Brillant.
Sébastien Boully