Un premier album excitant et des concerts énergiques ont placé Starcrawler très haut sur la liste de nos « espoirs punk rock » de 2019. Voici venu le difficile temps de la confirmation, et Devour You n’échappe pas totalement à la fameuse « malédiction du second album »…
Dès le second album – celui de tous les dangers, on le sait – nos Angelenos préférés de 2018 nous font le coup pendable de rentrer dans le rang. Eux qu’on attendait comme les dignes héritiers des magnifiques John Doe / Exene Cervenka de l’inoubliable X, ont pris un virage moins risqué commercialement en choisissant plutôt l’héritage 90’s de Hole, Garbage et consorts. Très produit – par un Nick Launay dont le beau pedigree (Yeah Yeah Yeahs, Nick Cave…) laissait espérer plus d’imagination – et très 21, Devour You commence plutôt bien avec « Lizzy » et les cris de rage d’Arrow de Wide dont la voix, plus assurée, fait des merveilles. Le tube glam, irrésistible, Bet my Brains achève de nous mettre de bonne humeur…
Une bonne humeur qui ne durera pas, l’album s’enlisant rapidement dans un enchaînement de morceaux aux mélodies certes efficaces, mais qui manquent singulièrement de folie, et échouent à recréer l’excitation teenage du premier album. L’autre single, She Gets Around, très nirvanesque, fonctionne bien, mais c’est quand même lorsque Starcrawler s’offre le luxe (enfin, on dirait que c’en est devenu un, pour eux) de revenir à de brefs brûlots punks comme Toy Teenager et Tank Top que le plaisir s’invite à nouveau. Heureusement, cet album mi-figue, mi-raisin (entendez : qui n’est ni une trahison de nos attentes, ni une confirmation du potentiel du groupe…) se termine sur un Call me Baby, bien troussé et qui, pour être le titre le moins purement « rock » de l’album, est peut-être celui qui indique une piste originale pour le futur du groupe.
Si l’on a un peu de mal cette fois à s’enthousiasmer, Devour You reste un album plaisant, qui montre que l’inspiration du groupe est loin d’être tarie, qu’Arrow est partie pour devenir une très bonne chanteuse, et que… comme c’est si souvent le cas, ce sera le troisième album qui confirmera ou non si notre coup de foudre instantané pour Starcrawler se transformera en amour sincère.
En attendant, dans la mesure où la scène permet normalement au groupe d’exceller, Devour You fournira son lot de bons morceaux pour étoffer une set-list qui était devenue aussi prévisible que les jets de (faux) sang d’Arrow de Wide.
Eric Debarnot