Quatrième volume de la collection Face B de chez Playlist Society, consacré à Valérie Donzelli : une lecture indispensable, et surtout émotionnellement et intellectuellement gratifiante pour tout amoureux du jeune cinéma qui ose !
D’un côté il y a cette petite collection de la maison Playlist Society, appelée Face B (petit format, petit nombre de pages, petit prix, mais grandes ambitions !), qui en est à son quatrième portrait de cinéastes « singuliers », après Wiseman, Imbert et Salvadori. De l’autre, il y a Valérie Donzelli, portée aux nues pour son la Guerre est Déclarée, puis descendue en flammes par une critique impitoyable pour Marguerite et Julien. Et enfin largement ignorée en 2019 pour son Notre Dame qui méritait pourtant autre chose que cette indifférence…
La rencontre entre une collection « militante » (au sens de la défense d’un beau cinéma hors des normes et des lois du commerce) et d’une véritable auteure, expérimentant formellement avec beaucoup plus d’audace que bien des réalisateurs bien plus célèbres… et célébrés, ne pouvait que donner une centaine de pages passionnantes, excitantes, et même régulièrement terriblement émouvantes.
Valérie Donzelli, le Tourbillon de la Vie s’ouvre sur une analyse synthétique impeccable de la filmographie de Donzelli, proposée par Thomas Messias, qui nous donne, évidemment, envie de revoir immédiatement l’intégralité de son oeuvre. Avant d’attaquer le morceau de bravoure, un interview extrêmement exhaustif, mais surtout fin, empathique, et émotionnellement impactant de la réalisatrice. Car à travers la conversation entre Donzelli et Quentin Mevel, se dessinent peu à peu les contours d’une ambition qui, derrière la modestie des propos de l’artiste, est loin d’être banale… Et aussi le récit des épreuves qu’a dû traverser une cinéaste pour que sa vision puisse se matérialiser en films, courts ou longs métrages, qui puissent être vus du public.
L’intelligence et l’humilité dont fait preuve ici Donzelli contrastent douloureusement avec les difficultés rencontrées durant sa courte « carrière », narrées au fil d’anecdotes aussi souvent savoureuses que douloureuses. Et qui nous font réaliser que, oui, Notre Dame est bien un portrait autobiographique d’une jeune femme du XXIè siècle, affrontant une succession irrationnelle d’échecs et de brèves épiphanies, mais se relevant encore et encore, pour nous offrir ces « petites » comédies tragi-comiques et vaguement expérimentales dont nous avons, parfois sans le savoir, terriblement besoin… soit une forme de résistance douce mais têtue à la brutalité de la réalité.
Eric Debarnot