Défricheur, le festival Belfortain l’est assurément. Le grand écart était assuré par trois groupes prometteurs – Otoboke Beaver, Bandit Bandit et Squid – qui partageaient un point commun : des guitares rageuses.
Les instruments paraissent trop grands pour elles, mais c’est sans se démonter que les musiciennes d’ Otoboke Beaver déversent un déluge de feu sans concession aucune. Les quatre japonaises alignent quinze idées et autant de cassures rythmiques dans un seul titre. D’une redoutable technicité, elles jouent vite, très vite. La chanteuse Accorinrin hurle, soutenue vocalement par les trois autres, qui s’appliquent à déverser un hardcore mâtiné de pop ou de groove. Que l’album In God We Trust des Dead Kennedys ai pu être un de leur disque de chevet ou pas, on y retrouve la même rapidité d‘exécution. Après plus d’une vingtaine de titres joués en 45 minutes, entrecoupés par les hurlements de la guitariste Yoyoyoshie, les Kyōtoïtes laissent le public exsangue et heureux.
Rude tache pour les jeunes lyonnais de Bandit Bandit que de succéder à pareille déflagration. Pourtant ils ne manquent pas d’aplomb. Une chanteuse un brin désabusée à la voix juvénile et des musiciens qui jouent avec conviction un rock lourd typé stoner, enchaînent les titres avec assurance, même si ces derniers tournent souvent autour d’un riff. L’utilisation originale d’un Tzouras leur confère une approche psychédélique et orientale pas dénuée d’intérêt. Inspirés autant par le rock 70’s que par The Dead Weather, Maëva et Hugo tracent leur chemin sans se poser de question, avec l’espoir de rencontrer le succès, à l’instar d’un Superbus sentant le cambouis et hurlant de fuzz.
Enfin arrive Squid. Un quintet qui a migré de Brighton pour Londres et dont la réputation ne souffre pas du Brexit. Et on comprend vite pourquoi. Leur post punk tantôt dansant, tantôt expérimental, est sublimé par un jeu de guitares tout en finesse et par la complémentarité des deux chanteurs. Une voix plus harmonique pour le guitariste Anton Pearson et plus vindicatif pour le chanteur-batteur Ollie Judge. La présence de nombreuses percussions accompagnées de cornet et trompette renforcent le rythme syncopé souvent irrésistible. Cette approche anguleuse des chansons n’est pas sans rappeler les austères mancuniens de Duds, voir les Talking Head en plus noise pour une version post punk 2.0. Et tant pis si leur set s’essouffle quelque peu sur la fin, Squid a largement convaincu de son potentiel et rejoint les formations les plus en vue du rock anglais actuel, au coté de Dry Cleaning, Automatic ou encore Black Country- New Road.
Texte : Mathieu Marmillot
Photos : Julien Boiteux