Troisième album pour Niandra Lades, groupe-phare de la scène indie de Clermont-Ferrand, qui nous propose neuf chansons impeccables, entre noirceur existentielle et suavité pop. Le tout sous un déluge de guitares : à la fois touchant et revigorant.
« I’m not from Detroit… » nous prévient crânement Alexandre Costa sur Malvo… mais de Clermont-Ferrand : la présence des volcans autour de la capitale française du pneu annonce néanmoins la tonalité de ce troisième album de Niandra Lades : le spleen existentiel sera illuminé par le fracas de guitares… volcaniques. Le groupe clermontois apparu en 2012, dont le nom fait – assez curieusement – référence à un disque de John Frusciante des années 90, en est à son troisième album, et a progressivement électrifié son Rock Indie sombre, déployant désormais une science de la tension peu commune.
D’emblée, Wrong Wray Men nous emmène du côté des Pixies première époque, c’est dire le niveau ! Oui, c’est un démarrage stupéfiant d’un album qui évoquera bien sûr les nineties, sans sonner nostalgique pour autant : les guitares grincent, les voix sont menaçantes et les chœurs suaves, le refrain accroche, et ça explose sur la fin, comme on aime… forcément !
You Drive my Mind surprendra ensuite qui ne connaît pas encore le groupe, avec son ambiance mélancolique et sa ritournelle très Cure, mais une fois encore, le refrain se mémorise immédiatement. Ce sera la voie principale que poursuivra l’album, ces guitares à la fois omniprésentes et comme distanciées qui mènent la danse tout en sonnant plutôt vaporeuses, dans la bonne tradition shoegaze, qui emportent des mélodies dont on comprend mal si elles veulent nous faire pleurer ou danser (The Same Boat).
Untitled w/Bass, premier moment introspectif, joue la carte de l’émotion tremblante avec de s’élever progressivement vers le ciel. Malvo fait à nouveau parler la poudre : « Sometimes the Bad Decision is sometimes the Good Decision ! », et on monte instinctivement le volume sur ce titre impérieux qui fait s’élever d’un cran la puissance de l’album, The Witches continuant dans la même tonalité brutale et saturée.
https://www.youtube.com/watch?v=UbGq5g3nHeo
Where is your Smile, toujours sous la menace de guitares lourdes, se fait planant, rêveur, mais n’hésite pas à aller chercher la transe : s’interrompant trop vite alors qu’on en demande encore, voilà un morceau qui gagnera sans doute à une interprétation scénique.
Don’t Throw Your Rights, avec sa belle explosion d’urgence, ouvre à la voie à la superbe conclusion de l’album, un It’s Time qui repositionne You Drive my Mind franchement sur le territoire des émotions : le genre de chanson à l’évidence parfaite que, si nous avions encore 15 ans, nous écouterions en boucle pour nous préparer à l’infinie tristesse du monde, et en ressortir avec une combativité nouvelle.
Et si ce bel album sensible, aussi brumeux que déterminé, était l’une des meilleures choses qui soit arrivée à notre Rock hexagonal en pleine explosion créative en ce début des années 20 ?
Eric Debarnot