Après cinq ans d’attente, le groupe d’Oklahoma Other Lives fait un retour vers le futur somptueux, avec For Their Love, un album entre folk et surréalisme.
Il est ardu, quasi impossible de ne pas être fan et objectif avec le groupe Other Lives. Simplement par le fait de la richesse picturale de ce groupe mais aussi cet effet poétique que sa musique entraîne. Planant et surprenant, américain et spatial, naturel et légèrement tordu, le son d’Other Lives est toujours enveloppant et plaisant. Si Tamer animals en 2011 tombait dans nos oreilles comme le miel et Rituals, en 2015, justifiait à lui tout seul l’amour que porte Radiohead à ce groupe, For Their Love achève une trilogie magique.
A nouveau, et mieux encore que par le passé, la voix calme venue de l’Amérique profonde de Jesse Tabish se laisse porter par la majestueuse et visuelle musique du groupe. Une voix parfois nonchalante, blessée ou timide, qui récite ou chante suivant l’émotion à procurer. Les envolées légèrement nostalgiques s’alignent sur nos ouïes, avec une délicatesse sournoise, proposant des voyages sonores intenses.
Enregistré à Cooper Mountain, poumon vert de Washington, For Their Love sent les vastes étendues et les nuages passant. Calme, posé, il s’écoute comme un léger sommeil. Sideways est cette panoramique sensible qui nous hérissera le poil longtemps, exemple parfait de l’onirisme du groupe. Other lives est un groupe de champs ouverts, qui cherche à ce que le son soit le plus naturel possible, mais tout aussi conscient des bienfaits du futur. Pour cela, les membres n’hésitent pas à métalliser leurs sonorités acoustiques, à jouer des plages superposées, et à adopter des rythmes parfois décalés. Ils peuvent nous surprendre avec une msuqiue de western électrique sur Lost day avant de partir sur des chansons presque difformes et intimes comme sur Dead language. Et comme des bons élèves des musiques américaines, ils sonnent comme un Sinatra usé sur All eyes – For their love.
Other lives n’a jamais été un groupe de colère ni de riffs fous comme leurs semblables The War on Drugs, bien que night’s out ou encore Hey Hey I possèdent un soupçon de rage. La puissance émane plus par la visualisation des chansons que par la fougue des instruments. For their love est un disque paysagiste, aux accents tristes et aux effluves texanes, un pas de plus dans l’intimité du groupe. Certes il n’est pas aussi mordant que Tamer Animals ni autant recherché que Rituals, mais il est plus sensible et plus vaste, plus nu et americana aussi. Et si’l fallait trouver un reproche à faire au groupe, ce serait pour le temps qu’ils ont mis à le publier. Pour les accrocs, cinq ans, c’est trop.
Guillaume Mazel