Sorti très discrètement sur Netflix, Spenser Confidential, le dernier film du tandem Berg / Wahlberg ranime les fantômes d’une époque où le cinéma d’action bon enfant remplissait les salles de cinéma populaire.
Il était difficile d’admettre que nous puissions réellement regretter des films du genre de l’Arme Fatale et autres polars de bourre-pifs et de rigolade du cinéma populaire du siècle dernier, et pourtant… s’il y a une chose que l’on se dit en regardant défiler le générique de fin de Spenser Confidential, c’est que ce cinéma-là nous manque. Et le plus drôle, c’est que ce sont aussi bien les (gros) défauts que les qualités (notables) du dernier film du tandem Peter Berg / Mark Wahlberg qui suscitent cet accès de nostalgie…
Pour les défauts, ils sont faciles à répertorier : une intrigue dont le déroulement est totalement prévisible (… mais cela ne fait-il pas en fait partie du charme ?), et surtout une dernière partie qui préfère régler, sans trop se préoccuper de vraisemblance, à coup de camion-bélier et de coups de poing dans la g… une situation trop complexe pour la durée du film (… et ce n’est pas souvent que nous réclamons ici des films plus longs !). La faiblesse du « règlement de comptes » final par rapport aux attentes que le scénario avait pu faire naître, avec sa dénonciation de la collusion entre forces de l’ordre corrompues, gangs latinos et investisseurs immobiliers mafieux, est certainement ce qui empêchera que l’on garde de Spenser Confidential un vrai bon souvenir. Et pourtant…
… Pourtant les raisons de se réjouir ont été nombreuses au long du film, avec en premier lieu d’ancrage du film dans la ville de Boston, pour laquelle on sait que Walhberg et Berg ont une véritable affection, ancrage qui offre une crédibilité peu courante à un film qui se positionne pourtant dans la pure fantaisie ludique. Il y a ensuite une jolie galerie de personnages farfelus, aussi bien du côté des « bad guys », très méchants et parfois très bêtes, que des « good guys », qui sont plutôt une assemblée de bras-cassés; de psychopathes et de cas sociaux, tous joués avec une évidente délectation par des acteurs qui sont dans le pur plaisir : cela s’appelle une bonne direction d’acteurs, et c’est clairement une qualité de Peter Berg : on notera avec beaucoup de satisfaction la réjouissante prestation de l’excellent Alan Arkin, toute en décalage et en subtilité. Et, puisque ce genre de film est évidemment une comédie « d’action », louons enfin la sympathique brutalité physique des combats qui pimentent régulièrement le film, et qui permettent à notre ami Mark Wahlberg d’arborer un masochisme rigolard qui pourra évoquer – en moins doloriste – le Mel Gibson des grandes années. Comme quoi, on y revient, à cette Arme Fatale !
Finalement, il se peut très bien que ce cinéma-là, un peu stupide mais indéniablement « humain », soit complètement dépassé en 2020. Ce serait quand même dommage.
Eric Debarnot