Seconde saison à la fois spectaculaire et passionnante pour Kingdom, la série TV coréenne qui challenge aussi bien Game of Thrones que Walking Dead : une réussite !
Si l’on avait pu émettre quelques réserves devant la première saison de Kingdom, comme sur les touches de burlesque pas vraiment drôles, et peut-être aussi sur une certaine difficulté (initiale au moins…) pour le spectateur occidental à appréhender les relations personnelles et rapports politiques entre les multiples personnages, cette seconde saison de la série coréenne à grand spectacle Kingdom se révèle parfaitement emballante, peut-être même ce qu’on a vu de plus « cinématographiquement » enthousiasmant sur nos petits écrans en cette première partie de l’année 2020.
Le premier point fort de Kingdom, encore plus criant, ici, c’est sa beauté visuelle, certes habituelle – dans une version picturale souvent figée – dans un certain cinéma asiatique de « reconstitution historique », mais ici sublimée par de remarquables idées de mises en scène et de mouvements. La plupart des épisodes sont réalisés par l’encore inconnu Park In-je, mais on a envie de retenir son nom, tant il est capable de rendre intéressantes les scènes les plus convenues, en particulier lors des longues scènes de bataille rangée entre « monstres » et humains : on ne peut s’empêcher de se dire régulièrement que si Walking Dead avait été mis en scène avec ce talent, on aurait pu passer sur la plupart de ses faiblesses scénaristiques !
Mais ici, point de faiblesse scénaristique – si l’on ferme les yeux sur certains déplacements de personnages d’un lieu à l’autre un peu trop rapides (un défaut que l’on relevait aussi dans Game of Thrones, rappelons-le…) – mais au contraire une histoire formidable, tant du point de vue politique qu’humain, qui se révèle dans cette seconde saison finalement plus passionnante encore que les confrontations gore avec les morts-vivants. Les complotistes parmi nous – et les autres, gageons-le – adoreront l’idée, fort contemporaine, d’une épidémie provoquée sciemment par les gouvernants à des fins d’abord militaires (disposer d’une armée de monstres pour résister à l’ennemi nippon), puis politiques (garder le pouvoir à tout prix), en sacrifiant sans aucun état d’âme le peuple, qualifié en permanence de « sous-humain » : voilà un sujet qui ne pourra que nous interpeller dans notre situation de victimes d’une pandémie peinant à comprendre les décisions politiques qui nous affectent !
Difficile donc de ne pas se laisser emporter par la puissance « lyrique » des deux grands combats ouvrant et fermant cette saison, la scène « finale » du lac gelé s’avérant particulièrement puissante et pouvant donner des leçons aux réalisateurs de Game of Thrones. Difficile aussi de ne pas se passionner pour les multiples complots et stratagèmes politiques qui s’entre-mêlent entre ces deux « grands moments » de la série. Difficile même de ne pas frémir aux côtés des personnages principaux, qui ont – pour la plupart – perdu dans cette saison leur côté parodique et ont gagné en profondeur, à l’image de l’excellent Ji-Hoon Ju qui confère cette fois une véritable humanité à son Prince Lee Chang, ou de l’actrice fétiche des Washowski, Doona Bae (vue en particulier dans Sense8 et dans Cloud Atlas), très convaincante en femme du peuple et médecin brillant.
On se montrera plus circonspect quant à l’épilogue final, qui semble promettre une suite dans un registre « policier » kitsch (oui, on a pu penser à un moment aux films déraisonnables de Tsui Hark) qui risque de décevoir après la splendeur de cette seconde saison. Mais on fera confiance à King Seong-hun et à son équipe pour maintenir le même niveau d’excellence dans un autre genre.
Eric Debarnot