A Rennes aussi – ancienne capitale du Rock français – on sait faire voler les boulons, et le réjouissant premier album, Garage Is Dead, de Clavicule confirme que nous avons en France un autre groupe de choc sur lequel il va falloir compter dans les mois qui viennent !
Garage is Dead est un titre très malin. Parce que tous les chroniqueurs vont forcément rétorquer : « No, Garage is not Dead ! », ou bien « Vive le Garage ! », ou encore « Vive Clavicule ! ». Et puis parce que ça permet de nourrir les discussions quant à savoir si la musique de Clavicule, c’est du « garage rock », ou bien autre chose. Donc ça occupe. Dommage que ça détourne un peu l’attention de la musique de ce groupe de Rennais dont on parle beaucoup en ce moment, et qui mérite d’être écouté pour ce qu’il fait, et surtout pour l’énergie qu’il dégage.
Puisqu’il est néanmoins impossible depuis au moins vingt ans de parler d’une musique sans citer ses références, disons qu’il est relativement aisé d’identifier ici des traces d’un heavy rock californien à la Ty Segall (soit quand même, un gros compliment de notre part !) : on y trouve en effet ce même mélange revigorant de positivisme joyeux, de mélodies pop et de guitares lourdes et tranchantes… avec peut-être, si on chipote, un peu moins de psychédélisme. Mais quand Clavicule s’énerve (comme sur l’irrésistible Today), on reconnaît avec une immense joie une similitude avec nos très, très chers Suédois bondissants de The Hives, ce qui pourrait bien être la meilleure nouvelle musicale du mois. Donc, pour revenir à ce que nous disions plus haut, on est plus dans le punk rock mâtiné çà et là de hard, que dans quoi que ce soit d’une tradition garage psyché entretenue vaillamment depuis les années 60… D’ailleurs, commencer leur premier album par un titre intitulé Asshole, c’est quoi, à part de la bonne vieille punk attitude ? En tous cas, ça vous pose un groupe, ça force le respect…
Mais ce qui est important ici, c’est surtout la qualité des chansons, mais aussi ce que Clavicule arrive à faire sans sortir le moins du monde des bonnes vieilles recettes du rock’n’roll dans ses déclinaisons les plus furieuses. L’accélération sonique de My Time est littéralement emballante, et Wake Up montre sans ambiguïté de quel bois on se chauffe en Bretagne, sans aucun complexe vis-à-vis des US. Quant à Vertigo, ce sera peut-être sur le long-terme le sommet de cet album, avec sa rythmique martiale et impérieuse… … même si le superbe final orientalisant de Jericho laisse lui aussi entendre que le potentiel de Clavicule dépasse le simple défoulement punk !
S’il y a un seul petit bémol à notre admiration pour cet album parfaitement troussé, et bien roboratif, ce serait les vocaux, qui sont quand même irréguliers : un titre aussi ambitieux que CAB aurait mérité un meilleur chant, et les petits « ouaah !!! » et « wooh !!! » occasionnels qui parsèment le disque font un peu sortir de l’ambiance. Mais ce n’est, après tout, pas très grave, car, sans les avoir vu encore sur scène, on est persuadés que ces diables de Clavicule vont nous exploser la tête lorsqu’ils auront à nouveau le droit de jouer sur scène devant un public qui n’en a rien à secouer des règles de distanciation sociale !
Ah, et au fait, pour leur second album, on se permet de leur suggérer comme titre « Prog Rock is still alive ! ».
Eric Debarnot