Le Serment des Lampions est un long voyage initiatique plein de douceur, qui métamorphose un jeu d’enfants, la poursuite de lumignons prêts à s’envoler vers les étoiles, en une quête merveilleuse.
À chaque équinoxe d’automne, les habitants du village lancent dans la rivière des lampions sensés, au terme d’un long voyage, rejoindre les étoiles. Quatre jeunes garçons font le serment de suivre à bicyclette les lumières, sans jamais faire demi-tour, ni regarder en arrière. Trois ont tôt fait de renoncer. Il ne reste plus que Ben et un gamin qui les a suivis à distance. Nathaniel est jugé par les ténors de la classe trop gentil, trop candide, trop généreux, un gars à fuir. Il les a entendu jurer et s’est engagé à aller, lui aussi, jusqu’au bout. Ben fait compte bonne fortune bon cœur, il apprécie avoir un compagnon, tout en gardant ses distances. L’enfance est cruelle. Les cyclistes franchissent le pont du Canyon au crapaud et basculent dans un univers fantastique.
Le dessin semi réaliste de Ryan Andrews, aux délicates couleurs pastel, est déroutant. Les décors, tels la vallée, la forêt ou le ciel étoilé, sont magnifiques et souvent présentés en pleines pages, alors même que les personnages sont rapidement croqués, la contrepartie d’une pagination de plus de 300 pages.
Le scénario multiplie les réminiscences aux Goonies, à Alice au pays des merveilles ou au Voyage de Chihiro. Si le monde « de l’autre côté du pont » est indéniablement fantastique — il « coche » les cases habituelles : une sorcière, des sorts, un ours qui parle, un chien géant marchant sur l’eau, une géographie mouvante — les enjeux et les oppositions sont faibles. Comme jadis Chihiro, les garçons se retrouvent débiteurs d’une sorcière. Moins effrayante que Yubaba, la sympathique Madame Majestic leur confie une quête, la recherche d’un ingrédient destiné à sa potion magique. Hélas, le pays de Majestic manque de relief, il est beau, mais un peu vide. C’est dommage.
Cependant, les personnages principaux, Ben, Nathaniel et l’ours pêcheur, sont très délicatement travaillés. La relation entre les garçons évoluera, passant d’une camaraderie distante à une véritable complicité. L’histoire plaira aux enfants, petits ou grands.
Stéphane de Boysson