Future Islands sort son sixième album, toujours formaté électro-pop, à la redondance coupable mais attachante, et dont le point d’orgue reste la voix du baryton S.T. Harring.
La carrière de Future Islands est en tout point remarquable. Pendant des années, le groupe établi à Baltimore, a écumé tout ce que les États-Unis comptent de clubs. Il a fallu un changement de label – au revoir Thrill Jockey et bonjour 4AD – et surtout un passage télévisé dans l’émission The Late Show de David Letterman en 1994 pour que le groupe change de dimension et touche le grand public branché avec leur tube Seasons. Leur prestation met en lumière leur chanteur Samuel T Harring, au physique presque ingrat selon les critères de la musique moderne, mais doté d’une voix impressionnante et de pas de danse proche d’un Aldo Maccione imitant un Bonobo en rut. Pendant que ses deux acolytes, à la basse et aux claviers, distillent une new wave organique à la fibre émotionnelle XXL.
Des débuts hésitants jusqu’à leur second album contenant le tube underground Long Flight, Future Islands se cherche. À partir de leur quatrième disque, Singles, qui inclut bon nombre de titres irrésistibles dont le fameux Seasons, le groupe trouve un état de grâce sonore en harmonie totale avec la voix. Un peu comme si Barry White rejoignait un New Order sans guitare.
As Long As You Are, leur sixième album s’inscrit dans une continuité douillette, avec toutefois une nouveauté, le batteur Mike Lowry vient rejoindre le trio et amène un son plus chaleureux que les boîtes à rythmes habituelles. La basse filtrée d’effets 80’s est toujours en avant et mène la danse mélodique pendant que les synthés remplacent les guitares, ce qui n’est pas prêt de changer à en croire le chanteur qui déclarait en 2017 à Vice : « J’ai toujours dit que le seul guitariste qu’on prendrait serait Johnny Marr ».
Les titres Walking et For Sur offrent une pérennité rassurante et retrouvent tous les ingrédients qui ont fait leur succès passé. Mais c’est le splendide Plastic Beach qui remporte la palme de l’émotion. Qu’il s’agisse de la voix impeccable, la construction mélodique et sa dynamique, tout est fait pour satisfaire les gardiens du temple.
Le groupe s’essaie aussi à un style plus conventionnel sur Born In A War, The Painter et For Sur, des chansons efficaces, simples et plus mainstream grâce à des rythmique plus discoïdes. Pas foncièrement déplaisant, ces titres feront le bonheur des radios. Plus inspirés et synthétiques, Thrill Melancholia et Hit The Coast rendent visite musicalement à M83 pour un déluge orgasmique de sons imparables. Quelques ballades – I Knew You, Moonlight et City’s Face – se reposent sur la voix chaude de Haring et sur des arrangements subtils. Et c’est finalement le titre en ouverture de l’album Glada qui résume le mieux le contenu de cet album, le cul entre deux chaises qui finit sur le tatami enveloppé de sons typés DX7 et d’une voix qui fait toute la différence.
Mathieu Marmillot