Dreamless Tribulations, le nouveau maxi 45T du groupe breton Denner est un bijou cold-pop équivalent à un strike. Parfait dans un océan de brume d’advection.
Denner signe son retour de bien belle manière. Plus pop et radieux que l’album précédent Drifting Canticles sorti en 2017, les quatre titres de Dreamless Tribulations ressuscitent en partie les archanges de la touching-pop, style typiquement français qui mixe la new- wave avec la pop et dont les meneurs se nommaient Little Nemo ou Asylum Party.
L’arrivée du multi-instrumentiste Marc Corlett (Soon She Said, Darcy) a changé la donne. Le groupe breton a évolué en se focalisant sur l’essentiel : un son compact et fluide au service de compositions terriblement efficaces. Le fameux dicton less is more – ou devrait-on le dire en breton – s’applique parfaitement ici. Mais surtout, la voix inspirée de Gilles Le Guen se montre pertinente mélodiquement et navigue autour de thèmes poétiques, naturalistes et existentiels.
L’ingénieur du son, l’ex-Craftmen Club Steeve Lannuzel, a su trouver un bel équilibre et il suffit d’écouter The Kelp ou l‘éclatant Turbulence pour s’en convaincre. Ces titres sont accrocheurs, la basse et la guitare jouent en symbiose et les rythmes dansants agissent comme un phare au milieu de la brume d’effets. Leurs trames musicales renvoient autant au Cure de la période The Head On The Door qu’au contemporain Traitrs. Low Life annonce l’ouragan mélancolique et encense les basses gothiques aux ordres de cadences martiales. Yann Even, à la guitare, perfuse des arpèges en suspension qui n’est pas sans rappeler le jeu de feu John McGeoch (Magazine, Siouxsie, Visage…). Tranquility et sa superbe introduction au piano, joué par François Houplain, célèbre le crépuscule pour mieux se jouer des trépidations comme Joy Division sur Twenty Four Hours.
Et ce n’est pas la pochette, tirée d’une superbe photographie de Paul Strand datant de 1915, qui dira le contraire.
Marmillot Mathieu
Cool. Cold Pop, on prend ! Au diable le noir pour le noir. L’obscurité n’existe pas sans la lumière.