Tentative de réhabilitation de Black Box, une production Blumhouse bien mal aimée en dépit de ses solides qualités… un film qui déçoit les amateurs de genre mais pose de bonnes questions.
Parmi les productions Blumhouse désormais diffusées sur la plateforme Amazon Prime, Black Box d’Emmanuel Osei-Kuffour ne semble pas beaucoup recueillir les suffrages des amateurs de films de genre, qui se déclarent pour la plupart frustrés devant un concept SF intéressant mais ne débouchant finalement que sur un drame familial convenu. Et si l’on retournait justement ce point de vue, et qu’on considérait que c’est là le grand intérêt de ce petit film ?
Black Box – titre très faible, sans doute uniquement utilisé pour placer le film dans une sorte de » filiation Black Mirror », alors que le terme de « black box » n’est utilisé que deux ou trois fois, en passant dans les dialogues – s’inscrit plutôt par son sujet dans la lignée du fameux Get Out, même si les conclusions d’un sujet de science-fiction assez similaire ne sont cette fois pas politiques, mais psychologiques, voire « philosophiques » : pour simplifier, devrait-on dire « Moi et ma tête ? » ou « Moi et mon corps ? ». A partir de la confusion totale dans l’esprit d’un rescapé amnésique d’un grave accident de la route, Osei-Kuffour et son scénariste nous proposent un voyage assez classique du protagoniste principal vers une redécouverte de soi, dont il faudra bien tirer à la fin les conséquences, tout en ajoutant au propos science-fictionnel de base quelques éléments horrifiques – les visions de Nolan durant ses rêves et ses expériences sous hypnose – correspondant logiquement à la charte Blumhouse. Mais comme ces aspects horrifiques sont bien amenés, avec un joli travail sur la bande-son, et sont parfaitement justifiés par le scénario – ce qui n’est pas si courant que ça, avouons-le -, on aurait tort de les reprocher au film, même si ces aspects « films de genre » ne sont pas ce qui rend Black Box intéressant.
Car la question posée ici est toute simple, et pourtant brûlante : d’où vient la violence masculine, et particulièrement la violence conjugale ? Qu’est-ce qui fait qu’un homme frappe sa femme, son enfant ? Est-il possible pour un homme violent de changer, même en passant par un traumatisme profond ? Si la réponse apportée par Black Box n’est pas réconfortante, elle a le mérite du réalisme, ce qui, dans un cadre fantastique, n’est pas si mal.
Réalisé avec soin, bien interprété, avec un Mamoudou Athie qui compense son manque de charisme physique par une voix chaude, marquante, Black Box a été aussi accusé par certains de ne pas apporter, à la différence de Get Out justement, de grain à moudre à la cause afro-américaine. On pourra rétorquer qu’il apporte du grain à moudre à la cause des femmes battues, de quelque origine qu’elles soient. Et qu’il est formidablement rafraîchissant de regarder un film où tous les personnages principaux sont afro-américains, alors que, justement, il ne s’agit pas d’un film s’intéressant aux sujets raciaux !
Eric Debarnot