Le visuel du disque ne laisse planer que peu de doute sur l’origine de Molchat Doma. Les biélorusses extraient la synthé-pop de la naphtaline pour mieux célébrer la nostalgie du temps passé mais finissent par convaincre seulement lorsqu’ils prennent les guitares.
Minsk, la capitale de Biélorussie, est connu pour la vivacité de sa scène musicale. Marqués par des sonorités new-wave ou post-punk, Dlina Volny, Soyuz ou Another Lips en sont les meilleurs représentants, au côté de Molchat Doma. Ces derniers n’existent que depuis 2017 mais font déjà figures d’anciens, avec trois albums sous le capot de leur minibus Maz МАЗ. Un cliché, mais avouons que le trio ne fait rien pour s’en débarrasser. Preuve en est, la pochette reflète la grandiloquence typique de l’art communiste quand Molchat Doma se réapproprie la new-wave sans complexe, comme si nous étions en 1982.
Monument a la particularité de présenter deux facettes du groupe. L’une recycle l’électro-pop rappelant au mieux Depeche Mode voir OMD. Utonut’, Discoteque et Udalil Tvoy Nomer sont des titres calibrés dont les claviers et le chant répondent aux codes stylistiques du genre. On tape du pied sans pouvoir esquiver un sourire convenu. L’autre facette privilégie des titres plus low-fi, les synthés disparaissent et sont remplacés par des guitares aériennes aux mélodies ciselées.
La comparaison avec Motorama peut s’entendre sur le pertinent Otveta Net et l’enjoué Zvezdy. La voix grave, lyrique et omniprésente d’Egor Shkutko, qui s’exprime dans sa langue natale, trouve une résonance émotionnelle particulière. Les deux comparses, Roman Komogortsev (guitare, synthés et boite à rythmes) et Pavel Kozlov (basse, synthés) assurent méthodiquement une rythmique brute et sans concession. Sans rapport avec le titre, Leningradskiy Blues et surtout Obrechen et Lubit’ I vypolnyat enfoncent le clou et prouvent que Molchat Doma n’est que meilleur, lorsqu’il ne singe pas une électro-pop quelque peu datée. Mais il est connu que dans la new-wave, le passé finit toujours par rattraper le présent.
Mathieu Marmillot