Deuxième partie de notre sélection consacrée aux disques de jazz pour l’année 2020. Au menu : Pat Metheny, Greg Foat, Tenderlonious, Matthew Halsall, Jimi Tenor, Josh Johnson, Moses Boyd, Melody Gardot, Christian Scott aTunde Adjuah et Avishai Cohen.
Au mois d’août, on vous donnait déjà un premier aperçu des très bons albums sortis au cours de l’année avec une sélection de 12 albums. Pour cette fin d’année, voici une seconde sélection, cette fois de 10 albums « coup de coeur » sortis durant cette année 2020.
Pat Metheny – From This Place
Enregistré par Pat Metheny avec son nouveau quatuor, From This Place est un album assez classique dans l’ensemble mais d’un charme et d’une grande beauté. Pétri de mélodies suaves et d’arrangements de cordes assez somptueux (Same River), il se révèle aussi d’une grande diversité, entre titres rapides (Wide and fare) et morceaux doux et caressants comme des musiques de films des années 50 ou 60 signées Henri Mancini, à l’image de celles que l’on trouvera sur la dernière partie avec notamment le langoureux Love My Take Awhile aux allures de morceau jazz orchestral à la Nate King Cole qui vient clôturer en beauté cet album.
Greg Foat – Symphonie Pacifique
Greg Foat est ce que l’on peut appeler un artiste à la fois touche-à-tout et très prolifique (3 albums en 2019 et déjà 2 pour 2020) que ce soit seul ou en duo. Un musicien aussi à l’aise quand il s’agit de composer des albums d‘inspiration Library Music, downtempo ou Jazz. Avec Symphonie Pacifique, le pianiste britannique propose un album luxuriant, rempli de titres au groove chaleureux, utilisant une instrumentation très riche, avec orgue, pedal steel, vibraphone, des cordes et même une chorale. Si vous n’êtes pas un habitué des musiques jazz et que vous ne deviez écouter qu’un seul disque pour cette année, alors ce sera celui-là.
Tenderlonious – Quarantena
Entouré de ses nombreux synthés, boîtes à rythmes et instruments plus ou moins vintage, le multi-instrumentiste anglais Edward Cawthorne (c’est son vrai nom) a imaginé des morceaux inspirés par ses œuvres de science-fiction préférées (Total Recall, notamment) ou encore 1984 de George Orwell, posant les bases d’une orientation musicale volontairement nostalgique. Dans l’ensemble, on navigue dans un jazz électronique et atmosphérique qui fait la part belle aux sons des claviers mais qui ne manque pas pour autant de groove. Porté sur certains titres par la trompette de Nick Walters Quarantena est un album foisonnant, aussi fascinant qu’addictif, avec des choix de production osés et réjouissants et qui évitent globalement les clichés. Un régal !
Matthew Halsall – Salute to the Sun
Avec Salute to the Sun, on retrouve les influences de John Coltrane, Alice Coltrane ou Pharoah Sanders dans un disque dans lequel on plonge sans difficulté pour se laisser bercer par les douces sonorités de la trompette du musicien de Manchester aux cotés duquel on retrouve Matt Cliffe (flûte et saxophone), Maddie Herbert (Harpe), Liviu Gheorghe (piano), Alan Taylor (batterie), Jack McCarthy (percussions) Gavin Barras (basse). Album très atmosphérique, presque ambient par moment, où l’on entendra ici ou là le doux bruit de l’eau, Salute to the Sun vient confirmer l’importance de Matthew Halsall sur une scène jazz britannique toujours aussi passionnante.
Jimi Tenor – Aulos
Evoluant dans des sphères jazz, soul, afrobeat, électroniques, le multi-instrumentiste et producteur Finlandais se forger depuis près de 30 ans un univers personnel, habité d’ouverture et de collaborations aussi diverses. Avec Aulos, il s’entoure de musiciens ghanéens, faisant convoler le groove et les arrangements sophistiqués sur des terres lumineuses aux secousses joyeuses, auréolés d’instruments à vent vagabonds, de rythmiques syncopées et de vocaux aériens. Un album qui puise son dynamisme dans le multiculturalisme et l’ouverture d’esprit, la joie de combiner et de danser sur un parterre de mélodies à l’âme partageuse. Superbe.
Josh Johnson – Freedom Exercise
Désormais lié à la scène jazz de Chicago, le saxophoniste et claviériste Josh Johnson a collaboré au cours de ces dernières années avec des artistes aussi divers que Jeff Parker, Kiefer, Makaya McCraven, Miguel Atwood-Ferguson, Leon Bridges ou Marquis Hill. Cette fois, ce passionné de Herbie Hancock et Wayne Shorter se lance en solo avec un disque enregistré en compagnie de trois de ses amis les plus proches. Un album très chaleureux très réussi, extrêmement dense, entre influences californiennes (il a vécu 8 ans a Los Angeles) et influences de Chicago, où il réside désormais. Son style alerte, changeant, plein de fantaisie et de liberté rappellera d’ailleurs par moment celui de Jeff Parker.
Moses Boyd – Dark Matter
Issu de la scène Jazz de Londres, Moses Boyd a déjà un joli parcours derrière lui avec quelques Ep remarqués et diverses collaborations avec des gens comme Four Tet, Sampha, Sons of Kemmet ou Little Simz. Sur Dark Matter, son premier album solo, on découvre un assemblage entre une instrumentation classique (cuivre, contrebasse, batterie…) et une multitude de sons samplés ici et là qui viennent appuyer des rythmiques complexes et très élaborées. L’album impressionne par son coté foisonnant, donnant l’impression que ça part dans tous les sens. Un disque passionnant et singulier pour ce batteur de formation qui, à tout juste 30 ans, maîtrise déjà parfaitement son art.
Melody Gardot – Sunset In The Blue
On fond littéralement à l’écoute de Sunset In The Blue, le nouvel album de l’artiste américaine à la voix de velours et aux lunettes noires. Un album aux rythmes bossa nova légers et aux chansons langoureuses, composé en partie durant le confinement et enregistré aux studios Abbey Road de Londres avec le célèbre Royal Philharmonic Orchestra. Aux côtés de la chanteuse américaine, on retrouve le producteur Larry Klein (Herbie Hancock), l’arrangeur et compositeur Vince Mendoza (Björk) et le légendaire ingénieur Al Schmitt (Frank Sinatra), sans oublier les nombreux invités qui contribuent à donner à ce disque une classe XXL.
Christian Scott aTunde Adjuah – Axiom
le trompettiste de La Nouvelle-Orléans continue de nourrir une discographie toujours aussi passionnante à l’image de ce Axiom où l’on retrouve le style toujours aussi virevoltant de Christian Scott aTunde Adjuah. Dans un album roboratif composé de 12 titres pour près de deux heures de musique, il fait preuve une nouvelle fois d’audace et d’inventivité avec des morceaux qui vont de 5 à 16 minutes enregistrés live au Blue Note de New-York juste avant que ne démarre le confirment chez nous. Un album en forme de parenthèse donc dans la discographie déjà bien riche du trompettiste avec des titres extraits notamment des albums Stretch Music, Diaspora ou encore Ancestral Recall.
Avishai Cohen – Big Vicious
Le style d’Avishai Cohen évolue sensiblement au fil des années, notamment depuis qu’il s’est entouré il y a six ans de son nouveau groupe Big Vicious composé de deux batteurs, d’un bassiste et d’un guitariste recrutés dans son pays d’origine. Mais sa musique elle reste toujours aussi aventureuse et imprévisible car le trompettiste israélien installé à New-York continue de nous épater avec des influences très diverse dans un jazz fusion qui tend aussi bien vers le rock que vers la musique électronique ou le trip-hop avec une reprise très belle du classique Teardrop de Massive Attack. Une évolution peut-être trop mainstream pour certains mais qui confirme en tout cas que la musique d’Avishai Cohen se veut plus ouverte que jamais.