Les Éditions Pow Pow, qui fêtent leurs dix années d’existence, misent beaucoup sur cette série insolite que sont Les Mystères de Hobtown. Le second tome, croisement improbable entre Harry Potter et Eraserhead, est paru à l’automne.
Le temps des fêtes approche, mais les mystères ne prennent pas de vacances dans la petite ville de Hobtown, en Nouvelle-Écosse. Cette fois, c’est Pauline et Brennan, membres du club de détectives amateurs, qui sont envoyés à l’académie de Knotty Pines, qui forme l’élite de Hobtown depuis plusieurs générations. Mais les sombres corridors de ce prestigieux établissement abritent de nombreux secrets… dont une terrible malédiction.
L’Ermite maudit, deuxième volet de cette série atypique, nous entraîne une fois encore dans le même univers étrange que l’on avait découvert avec L’Affaire des hommes disparus. Cette fois, les auteurs nous offre une sorte de huis-clos où le personnage principal serait cette immense bâtisse victorienne au milieu de nulle part, l’académie de Knotty Pines, entourée d’un vaste parc. A partir de là, l’ambiance est posée et on se doute que le récit nous réserve une bonne dose de frissons dans cet environnement qui pourrait rappeler Harry Potter. Les deux adolescents, très vite, seront confrontés à d’étranges événements dans cet établissement peuplé de fantômes et dirigé par des personnages austères et inquiétants, le directeur, que Pauline compare à un lézard, et sa femme, sévère, à l’allure robotique.
Si cet épisode est toujours aussi déroutant que le précédent dans sa façon de croiser un univers par moments onirique, digne de David Lynch, à un polar jeunesse de la « Bibliothèque verte », la narration semble un peu mieux tenue, tout comme le graphisme d’Alexander Forbes qui marque une évolution perceptible, avec un trait plus précis, plus assuré. On ne comprend pas toujours forcément les tenants et les aboutissants (peut-être faut-il croire aux fantômes ?), mais le récit de Kris Bertin reste intrigant de bout en bout, avec certains passages caractérisés par une sorte de frénésie narrative un brin enfantine. L’atmosphère est oppressante à souhait, et l’imposant édifice n’y est pas étranger. On serait même tenté d’y voir une référence — consciente ou non de la part des auteurs — au gigantesque et lugubre hôtel de Shining.
Cette série figurait en sélection officielle du Festival d’Angoulême 2021 pour le Fauve polar avec son premier tome, L’Affaire des hommes disparus, paru quelques mois plus tôt, et on peut le comprendre. Présentée comme la série phare de la jeune maison d’édition montréalaise Pow Pow, ce deuxième volet continue de s’avancer vers le genre fantastique avec une candeur non dénuée de charme. Et le lecteur adulte prendra volontiers plaisir à réactiver ses peurs enfantines, comme ont sans doute cherché à le faire les deux amis d’enfance que sont les auteurs en publiant cette histoire.
Laurent Proudhon