Des guitares acérées et tranchantes, une rythmique martiale et pressée, des claviers acides, une voix caverneuse pour une musique oppressante, sombre, lourde et étrangement mélodique. C’est Uppers, le premier album de TV Priest. Un disque direct et complexe, complet et passionnant.
Sur la plupart des morceaux d’Uppers, le premier album de TV Priest, on trouve les mêmes guitares acérées et tranchantes, les mêmes riffs lourds qui déchirent et découpent tout sur leur passage. On trouve la même rythmique lourde et martelante, martiale et pressée, urgente, laissant peu de répit. Et ce ne sont pas les claviers qui sauvent quoi que ce soit – un peu décalés, inharmoniques, grinçants quand ils arrivent, il participent du mouvement général. Et ce n’est pas la voix qui aide non plus. Là encore, tout au long de l’album, cette même façon de déclamer – plus que de chanter –, d’une voix grave, caverneuse. Des cris, des hurlements quelque fois. Une musique qui emporte, emballe, vous démonte les oreilles.
On sent le désespoir, la hargne aussi et la colère. L’envie d’en découdre. Dans un environnement qui se délite, dans un monde qui part en morceaux. Un monde dévasté. Cette musique sonne sombre et noire sonne aussi comme un appel à la résistance. Uppers est un album vivant aux morceaux curieusement harmoniques et agréablement mélodiques. Cela peut saouler, épuiser. Oui, mais c’est terriblement vivant. C’est cette vie, cette énergie, cette force qu’Uppers transmet. Pas besoin de prendre quoi prendre quoi que ce soit pour se speeder quand on a sous la main le premier album de TV Priest. La musique de Charlie Drinkwater (voix), Alex Sprogis (guitares), Nic Bueth (basse, claviers) et Ed Kelland (batterie) suffit.
Cela commence dès The Big Curve, le premier morceau qui met la barre très haut, posant là tous les éléments qu’on va retrouver dans l’album – des paroles slammées qui dérapent en cris quasi-hystériques, une ligne de basse lourde qui vous fait vibrer les entrailles, une batterie qui vous fait trembler les dents et des riffs de guitares qui vous vrillent les oreilles. On en sort déjà un peu abasourdi. Pour rentrer dans Press Gang qui commence assez calmement sur une rythme de batterie qui ressemble à un compte à rebours. Mais pas de répit, les guitares arrivent, la basse aussi. Et ça fait mal, mais ça passe parce que c’est mélodique. Leg Room commence également assez tranquillement, Chris Drinkwater sort même des ses déclamations pour chantonner un peu, pas longtemps, juste le temps de tromper l’auditeur, le faire patienter jusqu’à ce que basse et batterie et guitares reviennent à la charge et l’intensité remonte d’un cran. Journal of a Plague Year est plus calme, plus lent, pas plus serein. On sent toujours la même violence, la même force, la même hargne. Un son presque new wave, claviers et guitares compris. L’ambiance de ce morceau est très sombre, même si pour une fois pas de mur de son.
Et puis arrive la pause quasiment new age de History Week. Pas de basse-batterie-guitare qui hurlent ici. Une respiration de deux minutes, avant que ne commence la deuxième partie de l’album.
D’abord les extraordinaires Slideshow et Fathers and Sons, deux morceaux qui combinent admirablement mélodie, lignes de basse rondes et subtiles, guitares fortes et batterie lourde. Des morceaux quasiment dansants. Puis The Ref, autre respiration, une porte s’ouvre, grince et se referme. Au cas où on aurait voulu sortir. On se retrouve enfermés dans les trois derniers morceaux. Légèrement différents des précédents, on y retrouve une certaine dimension new wave. Le côté mélodique est plus marqué. L’ambiance est plus sombre, caverneuse. Des morceaux presque plus faciles mais pas apaisés pour autant. Saintless termine l’album sur une note à la Bauhaus (???). La deuxième partie, presque différente, est évidemment aussi bonne que la première ! On est prêt pour recommencer, s’il le faut. Et, franchement, il le faut.
Alain Marciano