As The Love Continues, le 11e album studio de Mogwai est peut-être leur meilleur album à ce jour, avec ses pianos délicats et cristallins, ses mélodies subtiles, ses cataractes soniques plus douces que des tonnes de coton, ses arpèges magiques…
Dans le très beau texte qu’il a écrit pour accompagner la sortie d’As The Love Continues, le dernier et remarquable, fantastique, mystique, énorme, ultime… et 11e album de Mogwai, Robin Ince dit « qu’il s’agit d’un album de peu de mots qui nous laisse trouver le sens qu’on veut y trouver ». Robin Ince se demande aussi « comment on peut parler d’un album dont le groupe n’a jamais parlé pendant qu’il était en train de le produire ». Pirouette qu’il serait facile de reprendre telle quelle. Mais c’est tellement vrai.
Comment parler d’un album de Mogwai ? Peut-on parler de Mogwai ? Je veux dire : a-t-on encore besoin d’en parler ? Mais aussi a-t-on envie d’en parler ? Un album de Mogwai est une expérience sensorielle, qu’on a peut-être envie de partager mais qu’il est difficile, délicat, impossible de mettre en mots. C’est un ensemble d’images qui vous caressent ou vous emportent – selon le tempo du morceau –, une rivière, une source d’eau pure, un océan déchaîné, une brise légère ou un vent turbulent. Une expérience unique… qui se renouvelle à chaque album ! Mogwai est ce groupe n’a quasiment jamais cessé de se renouveler tout en faisant la même chose. Qui a quasiment toujours été meilleur d’album en album, en restant l’égal de lui même. Mogwai est ce groupe dont on est obligé de réécouter les anciens albums – qu’on avait déjà trouvé supérieurs aux précédents – pour se convaincre que, non, on ne rêve pas : ces albums étaient superbes ; celui-ci l’est également.
Le son d’As The Love Continues est LE son de Mogwai, ce son unique qu’on reconnaît les oreilles fermées. Avec ses pianos cristallins et délicats qui dessinent des harmonies que les voix chantent rarement. Avec ses cataractes soniques puissantes, énormes et douces à la fois, plus douces que des tonnes de coton. Avec ses arpèges magiques et mystérieux. C’est ainsi que commence l’album : To The Bin My Friend, Tonight We Vacate Earth – un battement de coeur à la batterie, quelques notes de piano, des arpèges et une avalanche de guitare. Un morceau assez lent mais si typique du groupe. Effectivement, on quitte terre.
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La plupart des morceaux ont cette structure, alternant moment de calme aériens et de force tellurique. Ici ce sera plutôt le synthé qui racontera la mélodie – Dry Fantasy par exemple. Là ce sera plutôt la voix – rarement, pour tout dire, comme sur Here We, Here We, Here We Go Forever ou le très planant Fuck Off Money – une voix métallique qui murmure des mots incompréhensibles et qui donne aux morceaux une dimension mystique. Il y a un seul morceau véritable chanté – Richie Sacramento et une de ces mélodies dont Mogwai a le secret et qui sont si émouvantes.
Certains morceaux sont plus liquides ou aériens que d’autres – à cause des pianos et synthés. Certains sont plus secs, à dominante de guitares. Tous sont beaux et émouvants. Tous sont puissants et calmes. Comme le remarquable It’s All I Want To Do, Mum qui clôt l’album… un morceau qui monte, crescendo avant de redescendre et finir lentement, très lentement sur quelques accords de guitares… As The Love Continues, le titre s’impose de lui-même.
Alain Marciano
Mogwai – As The Love Continues
Label : Rock Action / [PIAS].
Date de sortie : 19 Février 2021