Florence Aubenas s’est plongée durant plusieurs années dans la vie de l’acteur Gérald Thomassin et de la petite ville de Montréal-la-Cluse pour une enquête minutieuse autour du crime mystérieux de la postière Catherine Burgod. Un livre enquête aussi fascinant que captivant.
En 1991, l’acteur Gerald Thomassin reçoit le César du meilleur jeune espoir. Une récompense obtenue pour le film Le petit criminel de Jacques Doillon. Quelques mois plutôt, au cinéma, la France découvrait un jeune acteur de 16 ans sorti de nulle part et qui avait séduit le réalisateur lors d’un casting sauvage, pour sa spontanéité, sa fraîcheur, son authenticité. Près de 30 ans plus tard, après une carrière en dents de scie et une vie pour le moins mouvementée, Gerald Thomassin est porté disparu alors qu’il était attendu au Palais de justice de Lyon, convoqué dans le cadre d’une affaire de meurtre.
C’est de cette affaire dont parle Florence Aubenas dans son nouveau livre de nonfiction L’inconnu de la poste dans lequel elle a remonté le temps pour évoquer le crime sordide d’une postière dans un petit village de l’Ain, et en parallèle la vie compliquée de celui à qui l’on avait prédit une grande carrière cinématographique.
La journaliste et écrivaine, connue notamment pour ses grands reportages quand elle travaillait pour le quotidien Libération, auteure du livre Le Quai de Ouistreham en 2010 nous plonge dans un récit digne d’un film de Claude Chabrol pour dresser le portrait d’une petite communauté, celle d’une bourgade de province comme les autres dans laquelle s’est déroulé un drame sordide.
Florence Aubenas a mené une enquête minutieuse, rencontré et interrogé les protagonistes de l’affaire, les proches de la victime, dont le père de Catherine Burgod ; elle s’est immergée dans la petite ville de Montréal-la-Cluse, pour, au fil des pages, nous conduire dans une intrigue policière, dans dans un roman noir où l’ambiance rappelle par moment les livres de Georges Simenon, avec un personnage central à la fois fascinant, attachant, mystérieux, insaisissable, intriguant et que tout semble accuser mais pour lequel on ne veut imaginer le pire.
Florence Aubenas à travaillé durant six ans sur cette affaire, pour dresser le portrait de Montréal-la-Cluse et de ses habitants, des gens normaux, mis à part peut-être le trio que forme Tintin, Rambouille et Thomassin, trois marginaux qui passent leur temps à boire des bières et à fumer des cigarettes, et dont on voudrait bien faire les coupables de ce meurtre insoluble.
Il faut dire que le CV de nos trois gaillards est bien chargé. Tous trois ont connu un parcours chaotique et notamment Thomassin qui, avant d’être repéré par Doillon, a connu la DDASS, les familles d’accueil et ensuite pas mal d’errance avant et après les tournages.
La grande force du livre est de donner directement ou indirectement la parole à tout le monde, de ne porter de jugement sur personne, mais aussi de décrire tout ce petit monde de manière quasi sociologique et anthropologique. Florence Aubenas met beaucoup d’humanité dans ce récit totalement captivant qui se lira d’une traite ou presque. Un livre qui réserve son lot de rebondissements… évidemment, au moment de se plonger dans ce récit, il faudra en savoir le moins possible sur cette affaire, il ne faudra pas être tenté d’aller sur Wikipédia ou ailleurs afin de préserver au maximum le suspense.