Francis Navarre nous invite sur les routes de France, à pied ou à moto, pour dénicher les plus jolis coins, les plus beaux paysages, les plus pittoresques villages. Un livre riche d’anecdotes, de morceaux d’histoire, de légendes… Pourquoi partir loin quand l’aventure commence dès le premier chemin creux ?
« L’on ne peut voyager loin si on ne sait voyager près. Il y a cent expéditions à entreprendre à proximité ». Cet aphorisme qui introduit le dernier recueil de Jean-Pierre Otte, La bonne vie, pourrait parfaitement figurer en incipit du dernier livre de Francis Navarre dans lequel il démontre qu’on peut accomplir de très beaux voyages et de très belles balades sans avoir recours à des moyens de transport surpuissants et gloutons en énergie. La France recèle des merveilles naturelles d’édifices plus ou moins importants et même prestigieux qui enchanteraient le plus exigeant des promeneurs. Alors, suivons Francis Navarre sur les routes et sentiers de France qu’il a parcourus pour découvrir des coins et recoins de l’Hexagone qu’on peut visiter sans rien dépenser ou presque… avec juste un peu de sueur.
Que ce soit à pied, à moto – sur sa vieille Guzi -, ou même avec un van que j’ai cru apercevoir sur un parking des Vosges, qu’il pleuve à seau, qu’il vente, que le soleil cogne, Francis Navarre parcourt cette France que les touristes délaissent, celle des monts et vallées que les grandes voies de circulation boudent depuis des siècles. Les différents périples qu’il évoque et qu’il nous invite à accomplir se déroulent sur plusieurs décennies. Ils commencent par une ancienne randonnée à moto partant de l’Aubrac pour traverser le Rhône, remonter les Alpes, retraverser le Rhône dans l’autre sens et parcourir le Massif Central jusqu’à la Corrèze qu’il affectionne tant. Il enchaîne par un périple en Lorraine en démarrant de Champagne, à Langres, puis en passant par Domrémy-la-Pucelle, Nancy, plusieurs villes minières avant de revenir vers le sud à Contrexéville.
Il poursuit par une très longues randonnées pédestres à travers le Massif Central en empruntant pour commencer un itinéraire proche de celui que Stevenson a parcouru avec son âne. Au cours de cette randonnée, Francis Navarre nous raconte des morceaux de l’histoire de France, celle des régions, celle des habitants. Il nous rapporte des us et coutumes toujours respectés. Il décrit, les villes (Langogne, Le Puy…), des bourgs, des villages, des monts (Aigoual…), des vallées, des causses (Méjean…). Il évoque aussi les personnages nés dans ces régions, comme Lafayette, et tout ce qui a fait leur fortune au siècles passés et tout ce qui a provoqué leur déclin depuis la dernière guerre mondiale.
Dans son langage pétaradant comme sa vieille moto, riche de mots rares et goûteux, Francis Navarre nous convie à une balade le long de la fameuse diagonale du vide qui coupe désormais la France en deux en suivant une ligne qui relierait Strasbourg à Biarritz. Une balade pleine de charme et de nostalgie à la rencontre de la France de nos aïeux, la France authentique et rurale qui ignorait tous les artifices factices qui encombrent actuellement nos paysages pour essayer de les vendre à des touristes nourris au lait frelaté des médias à la somme des gens de marketing. « Il est facile aujourd’hui d’être himalayesque ou sibérien, mais comment peut-on être Mussipontain ». Qui peut se vanter aujourd’hui sans risquer le ridicule, de passer ses vacances dans le Quercy, la Vôge, le Dauphiné… et bien d’autres belles régions au nom qui sonne bien la France de notre histoire, la France rurale et authentique qui rassemble encore tant de merveilles que j’aime moi aussi découvrir au cours de virée en voiture, c’est ma concession à la civilisation actuelle. Mon penchant à la mollesse voltairienne !
Denis Billmaboz