Premier long-métrage de Darius Marder, Sound of metal suit le parcours d’un jeune batteur qui devient progressivement sourd. Un beau film sur la résilience et l’acceptation, (em)porté en entier par un Riz Ahmed fiévreux et intense.
Inconnu au bataillon jusqu’au succès critique de son film dans divers festivals internationaux, Darius Marder n’avait alors à son actif qu’un documentaire réalisé en 2008 (Loot) jamais sorti en France et sa participation au scénario de The place beyond the pines de Derek Cianfrance qui, lui, produit Sound of metal dont il a également imaginé l’histoire avec Marder. D’ailleurs le personnage incarné par Riz Ahmed a exactement la même dégaine que Ryan Gosling dans le film de Cianfrance (cheveux décolorés en blond cradingue et tatouages partout sur le corps). Même allure donc, mais destin pas pareil.
Ruben est un as de la batterie et il forme un duo branché metal avec Lou qui, elle, joue de la guitare et éructe sur scène des « Je te veux ici-bas complètement nu » et des « Quand t’ai-je amené au bord du gouffre ? » et des « Laisse-moi y aller ». Et puis un matin, Ruben se lève et n’entend presque plus rien. Tout autour de lui résonne à peine, étouffé et lointain. Ruben va devenir sourd. Fini les concerts confidentiels, fini la route, fini le bruit et la sueur, fini l’idylle avec Lou. En attente d’une éventuelle (et coûteuse) opération pour se faire poser des prothèses, Ruben intègre une communauté pour sourds où il va devoir apprendre et le langage des signes, et à accepter le fait que son existence sera à jamais changée.
Tandis que Marder observe avec acuité et douceur le quotidien désormais chamboulé de Ruben, l’ingénieur du son Nicolas Becker (qui a quand même à son actif, entre autres, Gravity, American honey et Premier contact) élabore un incroyable paysage sonore donnant à entendre (ou plutôt à percevoir) ce qui est directement vécu par Ruben : un silence dans la tête, une réalité qui s’altère, un sentiment de perte, une envie de tout casser, mais aussi une résilience face à une situation dont il devra tirer le meilleur.
Si le scénario reste plus ou moins prévisible du début à la fin sans jamais chercher à surprendre (avec ce qu’il faut, dans l’ordre, de fond du trou, de renaissance, de choix à faire et de c’est ma vie après tout), Riz Ahmed est là pour le transcender en entier grâce à une interprétation intense et fiévreuse qui balaie tout sur son passage.
Michaël Pigé