Déjà parvenue à sa septième saison, annoncée comme la dernière, la série Harry Bosch continue à tutoyer l’excellence : la vision sociale, politique et profondément morale de Connelly se mêle une fois encore parfaitement au suspense des enquêtes policières.
Michael Connelly a de la chance : à la différence de la vaste majorité des adaptations à l’écran – films ou séries TV – des livres à succès, le Bosch d’Amazon Studios (Harry Bosch en France…) rend désormais parfaitement hommage à la qualité des livres, tout en s’en démarquant suffisamment pour que les lecteurs n’aient pas l’impression d’un travail scolaire des scénaristes (Bon, le fait que Connelly soit coproducteur exécutif de la série aide certainement !). Et ce n’est pas cette septième saison impeccable qui va changer quoi que ce soit à notre jugement très positif sur la série d’Eric Overmeyer, qui, après un démarrage assez lent, a atteint l’excellence à partir de sa quatrième saison.
Les scénaristes répètent ici, sans que ne se traduise aucune usure, la recette du succès des volets précédents : deux enquêtes policières complexes qui s’entremêlent, et un bon nombre d’intrigues parallèles dans lesquels sont impliqués quasiment tous les personnages emblématiques de la série, pour un résultat aussi complexe que finalement haletant (on est loin de la mollesse des débuts !). Pendant que Harry enquête sur un incendie criminel ayant coûté la vie à une petite fille immigrée, puis se trouve impliqué dans une affaire de scandale financier qui tourne vraiment mal, Jerry Edgar se débat avec son sentiment de culpabilité après l’exécution de Jacques Avril, le Lieutenant Billets affronte des flics « incels », tandis que le Chief Irvin Irving doit faire des pieds et des mains pour pouvoir être élu à un second mandat. Si l’on ajoute que Maddie (une Madison Lintz de plus en plus séduisante avec les années qui passent) se trouve dans la ligne de mire d’un tueur à gage, on pourrait dire que les scénaristes en font vraiment beaucoup…
Pourtant, grâce à la qualité de l’écriture, le téléspectateur n’est jamais perdu devant la multiplication des intrigues… même si Bosch requiert une attention de tous les instants pour être appréciée à sa juste valeur. Et, comme dans les meilleurs moments des saisons précédentes, les scènes de suspense et d’action, pour être encore moins nombreuses qu’à l’habitude (on sait que Connelly est bien plus intéressé par la description du fonctionnement des machines policière et judiciaire), sont d’une efficacité démultipliée par leur sobriété.
La vision sociale – sur le melting pot bouillonnant qu’est Los Angeles et les conflits inter-ethniques qui en résultent – et politique – sur la corruption active ou passive endémique des autorités, mais surtout sur les manipulations permanentes auxquelles il faut se livrer si l’on veut survivre « au sommet » de la pyramide – reste prépondérante, et se mêle encore plus clairement qu’à l’habitude à un dilemme moral auquel il n’existe pas de réponse parfaite : ce qui amène la saison à une conclusion, lors d’une conclusion « brise-cœur », très pessimiste.
Avec ce que suggère la dernière scène de Bosch, on comprend la rumeur qui veut que la série se poursuivrait sous la forme d’un spin-off sur les nouvelles bases établies dans le dernier épisode, mais on a très envie que les responsables de ce succès s’en tiennent à leur promesse d’en rester là, à ce niveau d’excellence finalement étonnant.
Eric Debarnot