The Limiñanas nous ont offert hier soir dans l’écrin du Studio 104 de la Maison de la Radio des extraits de leur nouvel album, De Película, co-composé avec Laurent Garnier : boucles obsessionnelles et transe garanties !
Double programme alléchant pour cette rentrée et la reprise des concerts au Studio 104 : The Limiñanas qui viennent pour présenter leur tout nouvel album co-écrit avec Laurent Garnier, et Squid, le nouveau groupe sensation d’Outre-Manche ! Malheureusement, un problème de passeport périmé empêchera Squid de traverser le Channel, qui devient depuis le Brexit une sorte de « mur » infranchissable pour les musiciens britanniques, et nous voilà « réduits » à un seul concert… ce qui est mieux que rien, surtout quand il s’agit de Marie et Lionel Limiñanas, soit pas loin de ce qui se fait de mieux dans la scène rock française.
La salle est bondée ce soir, avec une jauge « normale », c’est-à-dire sans obligation de laisser un siège libre sur deux, même si, avec le passe sanitaire et le port du masque obligatoire, on reste dans le bon respect des règles de comportement en temps de pandémie. Sur scène, Marie et Lionel sont entourés de cinq musiciens, et on sait que Garnier est en coulisses, et qu’il viendra après le set participer à un interview groupé pour France Inter.
21h05 : Lancement du set après les news, nous allons profiter de la toute première interprétation live de De Película, ce nouvel projet de Lionel et Marie qui raconte une histoire, comme une sorte de road movie sans images, l’histoire d’amour entre Juliette et Saul, entre le Sud de la France et l’Espagne.
Si l’on pouvait se demander comment prendrait la greffe entre la techno de Garnier et le rock velvetien des Limiñanas, dès les premières mesures, les choses sont claires : pas un poil d’électro n’est venu se mêler au rock’n’roll « classique » de nos héros de Cabestany. Ce qui ne veut pas dire que l’influence du travail de Garnier ne se sente pas, puisque l’accent est mis désormais encore plus qu’avant sur la répétition (les trois musiciens confirmeront cette démarche dans l’interview qui suivra, prenant Can comme modèle de ce qu’ils ont voulu faire…) : la musique des Limiñanas n’a pas véritablement été ensemencée par la techno, mais a adopté le principe de boucles qui submergent peu à peu le groupe et le public, jusqu’à la transe…
Les six titres de De Película interprétés ce soir pendant les courtes 40 minutes de set sont donc tous construits sur la répétition acharnée d’un motif plus ou moins Rock, avec la narration assurée par deux des musiciens, dont Eduardo Henriquez – surnommé Edi Pistolas sur ce projet. Marie est devant son kit basique et continue à marteler un rythme imperturbable, Lionel se déchaîne à la guitare rythmique, et les pics d’intensité occasionnels sont apportés par le second guitariste ou par les claviers d’Edi en particulier. La musique est, comme désirée, la mise en forme d’une sorte d’obsession têtue, sur laquelle se raconte une histoire qui a, bien entendu, des allures autobiographiques : « Il s’agit d’un petit môme de province / Il aime la musique et le cinéma / Il va au lycée, mais il déteste ça / Il y a de la cruauté dans l’air… » peut-on entendre sur Saul.
Les deux sommets du set seront le formidable Que Calor !, où Edi met le feu, avec ses claviers enflammés et son chant passionné, et le final, Steeplechase, où le parallèle avec la musique de Can est le plus évident. Tout cela est tellement bon qu’on aimerait bien 40 minutes de plus, et une interprétation intégrale de l’album. Même si l’interview de nos trois héros est sympathique (on apprend par exemple que Lionel utilise le Louie Louie des Kingsmen comme sonnerie de son portable, que Marie et Lionel passent leurs journées à la plage, leur activité favorite…), on aurait préféré plus, beaucoup plus de musique. Surtout quand elle est de cette qualité-là !
Photos : Robert Gil
Texte : Eric Debarnot
“De Película” : la transe psychédélique imaginée par The Limiñanas & Laurent Garnier