Après des saisons 9 et 10 qui avaient marqué le redressement de la série, on se lance donc, avec cette première livraison de 8 épisodes, dans l’ultime ligne droite de Walking Dead. Mais la série s’est-elle réellement débarrassée de ses mauvaises habitudes ?
Comme ce fut le cas récemment pour la dernière diffusion d’épisodes de la Casa de Papel, on va râler contre la stratégie des plateformes (et des studios de production) d’étirer au maximum dans le temps la diffusion de la dernière saison d’une série à succès. Et puis on finira par accepter plus ou moins de bonne grâce de patienter avec les 8 premiers épisodes de la saison 11 de Walking Dead… série « historique » dont nous ne connaîtrons donc la fin que courant 2022, sachant que la diffusion du 9ème épisode est planifiée pour février.
Est-ce un problème, en fait ? Après le net redressement opéré à partir de la saison 9 par une série qui avait largement perdu ses marques – et une grande partie de son public – au fil des années, plusieurs de ces huit épisodes confirment le nouveau… « sérieux » de Walking Dead, du moins au niveau de sa production : adieu (au revoir ?) à l’image pourrie d’autrefois, aux scénarios rachitiques nourris de dialogues à rallonge et minés par les comportements absurdes des protagonistes. On écrit « plusieurs de… » au lieu de « tous les… », car plusieurs rechutes sont malheureusement visibles…
Cette onzième saison démarre quand même de manière plutôt intéressante, grâce à la découverte de deux nouvelles communautés : d’un côté les « Reapers » au comportement ultra-violent, conduits par Pope, vétéran de la guerre en Afghanistan halluciné et sans pitié se prétendant guidé par Dieu, et de l’autre le Commonwealth (le « Bien Commun »), une énorme alliance de groupements de survivants disposant de technologie et pouvant ainsi prétendre vivre « comme avant », mais dominé en fait par un système ultra-autoritaire de classes. Chaque communauté représente donc une forme de dictature face à laquelle nos héros figurent une sorte de rêve de plus en plus affaibli de démocratie. Le fait qu’ils soient obligés dans ces 8 épisodes de vivre selon les règles de ces modèles sociaux haïssables (le groupe d’Eugene s’est fait capturer à la fin de la saison précédente, tandis que Darryl a infiltré les « Reapers » pour permettre à Maggie de leur voler des provisions) permet à la saison de disserter non sans pertinence sur les dérives insupportables de ces modèles « fascistes »…
… Tout en nous montrant en parallèle l’extrême difficulté que la démocratie – réduite désormais à une Alexandria en bout de course – a à survivre, sans chef (puisque et Rick et Michonne sont partis) au sein d’un univers aussi hostile. On peut donc également considérer que Walking Dead maintient ses positions (historiquement) réactionnaires, prônant l’usage des armes, de la violence, de la torture même (comme dans l’épisode 5), et le recours à un leadership « naturel » face à un monde où la menace est autant externe – les walkers toujours près à franchir les murs dressés pour empêcher leur invasion ; mais aussi les menaces climatiques avec le terrible orage qui dévaste Alexandria lors de l’épisode 8 – qu’interne – les actes terroristes menés par d’autres survivants. Et ce sans même parler du fait que, contre toute logique matérielle d’ailleurs, la survie d’une humanité construite sur un système communautaire et écologique est traitée par les scénaristes comme rêvant de la pure et simple aberration !
https://youtu.be/1SwVVhzudPo
Si, comme on l’a dit, certains de ces huit épisodes sont d’un meilleur niveau que bon nombre de ceux des anciennes saisons, on ne peut s’empêcher toutefois de constater que Walking Dead retombe vite dans ses pires travers : un épisode comme le sixième, sombrant dans l’horreur de plus bas niveau avec sa maison labyrinthique habitée par des cannibales, prouve surtout que les scénaristes de la série restent prêts à faire feu de tout bois, au détriment de toute cohérence. Quant au huitième épisode – le dernier de cette livraison -, très médiocre avec ses scènes de remplissage ennuyeuses, ses comportements illogiques et ses deux cliffhangers de pacotille, il confirme surtout la difficulté que les scénaristes ont toujours à nous faire découvrir et à nous rendre attachants des personnages avant de les « exécuter » : en avons-nous réellement quelque chose à faire de voir les membres des Reapers se faire décimer ?
Alors que l’on se rapproche de la conclusion définitive d’une série qui a beaucoup agité ses fans comme ses détracteurs au fil de la décennie passée, et qui recueille toujours, contre toute logique cinéphilique, des suffrages extrêmement élevés de l’autre côté de l’Atlantique, le moins que l’on puisse dire, c’est que le jury délibère toujours…
Eric Debarnot