Avec La Piste de Yéshé, le dix-septième album de Jonathan, Cosey met un terme à sa série phare, quarante-six ans après Souviens-toi Jonathan…, avec une certaine émotion.
Suite à un chagrin d’amour, un jeune occidental découvre l’Himalaya. Jonathan ne le quittera plus. Au fil des albums, il s’inculture et s’imprègne de spiritualités orientales. Confronté à la guerre et à l’invasion chinoise du Tibet, il observe, puis s’engage, mais refuse de prendre les armes. S’il travaille pour vivre, ce grand empathique reste ouvert à la rencontre. L’occasion de se poser, d’écouter et de partager. Jonathan est l’opposé des héros traditionnels, Tintin, Spirou ou le plus moderne Blueberry. Il prend son temps et ne court pas. Jamais pressé, il interroge, commente et doute.
Le dessin réaliste peut surprendre par sa très grande simplicité : un travail d’épure à l’encre noire, des couleurs à dominantes ocres et bleutées, ou plus précisément bistre, sépia, safran et azur. Cosey privilégie les grandes cases pour poser ses magnifiques paysages.
Le scénario nous conte moins la fin de son héros, qui prépare son retour définitif en Europe, que son adieu à ses nombreux amis tibétains et, plus largement, à l’Asie, qui demeurera mystérieuse, car fondamentalement autre. De curieuses prises de notes manuscrites viennent ajouter à la confusion, Jonathan et Cosey tendent dans notre esprit à se confondre, tout en enrichissant notre réflexion. Adieu l’ami.
Stéphane de Boysson