Apple TV+, décidée à percer sur le créneau porteur des séries TV coréennes, a produit un alléchant Dr. Brain écrit et dirigé par le fameux Kim Jee-Woon. Après un démarrage laborieux, ce thriller de SF bien à la mode actuelle nous réserve quelques excellents moments, sans convaincre totalement.
Est-ce une pure coïncidence ou bien les autres plateformes courent-elles après le succès de Netflix avec son Squid Game, mais en tous cas les séries coréennes se multiplient ce moment… Ce qui n’est évidemment pas pour nous déplaire, vues les qualités du cinéma du Pays du Matin Calme. Apple TV+, qui a quand même tendance, malgré ses investissements lourds dans les séries TV « de prestige », à louper tous les coches, pour le moment, a ainsi mis en ligne sur novembre / décembre les 6 épisodes d’une production maison, Dr. Brain, qui se positionne en plein sur le territoire Netflix, puisqu’il s’agit d’un thriller à coloration nettement « science-fiction », inspiré d’un webtoon à succès… Et comme c’est Kim Jee-Woon qui est aux manettes (au scénario et à la réalisation), soit le responsable versatile de pépites comme 2 Sœurs, A Bittersweet Life, Le Bon, la Brute et le Cinglé et J’ai Rencontré le Diable, on a forcément très envie d’aller voir de quoi il retourne.
Dr. Brain, c’est Sewon, ex-gamin quasiment autiste devenu éminence internationale en termes de recherche sur le cerveau. Il travaille sur une technologie révolutionnaire qui permettrait de transférer le contenu d’un cerveau dans un autre, mais qui ne fonctionne pour le moment que sur les personnes récemment décédées. Quand son jeune fils meurt mystérieusement, et que sa femme tente de se suicider, Sewon met à profit son invention expérimentale pour mener son enquête, en intégrant les souvenirs de protagonistes du drame…
… Bref, rien de follement original dans ce scénario qui nous propose une enquête assez pépère, du moins dans les premiers épisodes, pas très excitants, menée qui plus est par un personnage assez détestable puisque ne manifestant aucune empathie : Lee Sun-Kyun, surtout connu pour son rôle dans Parasite, est très crédible – malheureusement – en véritable robot humain ! Et puis, il est difficile de ne pas pester devant une narration qui nous tient volontairement « dans le noir » de manière malhonnête quant à ce qui est arrivé au fils et à la femme de Sewon, avant de proposer des « percées » justifiées – mais peu justifiables – par la technologie assez aberrante du transfert des souvenirs. On est à deux doigts d’abandonner l’affaire quand les choses se mettent finalement en place, pour les 3 derniers épisodes, qui, sans être de réellement de haute volée, voient aussi bien la tension que les enjeux émotionnels monter clairement d’un cran. Une mise en scène de haut niveau (on parle de Kim Jee-Woon, quand même !), quelques twists malins, plusieurs méchants – oui, on est gâtés – particulièrement réussis, et, cerise sur le gâteau, l’humanisation progressive du Dr. Brain « contaminé » en quelque sorte par les cerveaux avec lesquels il s’est connecté (ce qui, en soit, est une très belle idée !), et nous voilà presque ravis par la conclusion de cette première saison… Au moins jusqu’aux toutes dernières minutes, qui relancent assez inutilement et artificiellement la machine pour justifier une éventuelle seconde saison, ce qui est bien dommage.
En résumé, si l’on n’attend pas de miracles, on peut prêter un peu d’attention à cette série qui s’avère plus touchante et convaincante qu’elle ne semblait a priori… même si Apple TV+ a encore des progrès à faire pour rejoindre Netflix dans le peloton de tête des séries coréennes à succès.
Eric Debarnot