Teenage Ends, premier album des Lyonnais déchaînés de Johnnie Carwash et déflagration punk joyeuse, risque bien de devenir, au fil des écoutes, l’album de ce début d’année morose qui nous réconciliera avec la vie. Et ça, ce n’est pas un mince compliment !
C’est peu de dire que, lorsqu’ils ont ouvert pour Johnny Mafia le 1er décembre dernier sur la scène de Petit Bain, les Lyonnais de Johnnie Carwash ont impressionné un public qui n’était pourtant pas venu pour eux. Et que du coup, le niveau d’attente que l’on pouvait avoir vis à vis de leur premier album est monté d’un cran…
Pour expliquer notre enthousiasme, que ne comprendront pas ceux qui ne connaissent pas encore le trio formé par Manon, au chant sucré mais joliment déviant – quelque part entre les Breeders et les Bangles, si l’on veut -, Bastien, le bassiste à l’impressionnante présence physique, et Maxime, le batteur de l’apocalypse (qui arrive même à ajouter un peu de claviers festifs de temps en temps…), il n’est pas inutile de rappeler que l’immense majorité des grands disques de Rock sorti depuis au moins douze mois sont des concentrés de dépression et d’angoisse. Ce qui n’est pas illogique, en 2022. Du coup, on avait presque oublié que, au départ, il y a très longtemps, dans une autre galaxie ou presque, le Rock’n’Roll avait été inventé pour danser, pour s’amuser, pour draguer, et pour toutes sortes d’activités qui semblent appartenir à une autre vie. Sauf pour Johnnie Carwash, qui depuis leur salle de répétition que l’on raconte en tôle et en face d’un lave-autos, ont décidé de rire de tout ça : ce qui constitue, paradoxalement, une punk attitude bien plus pertinente que de ressasser un « No Future » qui s’étale désormais aux manchettes de tous nos journaux (virtuels).
En fait, Teenage Ends est le genre d’album difficile à commenter, à expliquer, à disséquer, et on court le risque de trop parler de références évidentes et un peu tape-à-l’œil (du genre, certaines chansons sonnent comme du « Nirvana joyeux », si quelqu’un peut même imaginer ça !), et de répéter le même vocabulaire usé, avec ces mots inévitables : garage, DIY, WTF, punk, etc. Et on n’aura pourtant rien dit de l’évidence absolue de TOUS les titres (de l’intro provoc’ de I Don’t Give a Shit à la conclusion mélancolico- réflexive de Nothin’), de l’efficacité mélodique (Public Toilet, soit un joli titre, en passant, remporte la palme), des vocaux qui vous font immédiatement tomber amoureux (Junk Food), de la rythmique infernale sur la majorité des morceaux (Napoléon), des poussées extrémistes çà et là (Yeah Yeah Yeah, qui, d’un coup, ne fait plus autant rigoler…), de la guitare qui arrache des morceaux de béton par ci par là (Slut Skirt, démentiel !). Et encore moins du PLAISIR qu’il provoque en nous, un plaisir dont on sait déjà, vu le nombre d’écoutes de l’album en quelques jours, qu’il n’aura rien d’éphémère.
Quand on vous dit, quand on vous répète que le Rock français ne s’est jamais aussi bien porté qu’en ce moment… !
Eric Debarnot