Tristes adieux que ceux de Genesis, un groupe rincé qui n’a plus rien d’excitant à proposer, en dépit des efforts d’un Phil Collins encore pugnace malgré son état physique alarmant. On sauvera au mieux une quinzaine de minutes de cet interminable calvaire de deux heures et demie…
C’est quand même une drôle d’idée d’aller dans une salle aussi peu accueillante que la Paris La Défense Arena pour voir Genesis, un groupe que l’on n’a jamais particulièrement apprécié (tout au moins après le départ de Peter Gabriel…). Mais nous avons vite découvert que nous n’étions pas les seuls à sacrifier à ce rituel bizarre : l’annonce que ce serait fort probablement la dernière tournée du trio Collins-Banks-Rutherford, du fait de l’état de santé précaire du chanteur, justifiait sans doute ce drôle de réflexe du fan de music live, consistant à se dire : « il faut quand même que je voie Genesis une fois sur scène avant que le groupe disparaisse ! ». Et sait-on jamais, nul n’est à l’abri d’une bonne surprise ?
L’Arena n’est pas totalement pleine pour ce second concert parisien, mais suffisamment bien remplie pour que ça ne pose pas de problème… mis à part une température peu agréable en cette froide journée de mars, qu’on aurait mieux supportée si on avait pu être tous debout devant la scène, massés les uns contre les autres comme dans tout bon concert de Rock qui se respecte. Mais le public, largement d’âge moyen, voire plus, est plutôt dans l’état d’esprit d’une sortie tranquille en famille, ou entre amis, et tout le monde n’aurait sans doute pas été de notre avis.
A 20h30, les lumières s’éteignent, et sur une musique humoristiquement de circonstances – Dead Already de Tom Newman, le producteur de Mike Oldfield – une petite troupe entre sur scène : tous les regards sont évidemment tournés vers Phil Collins, à l’allure de vieillard chétif (on lui donnerait bien plus que ses 71 ans, malheureusement…), qu’on aide à grimper les marches de la scène, et qui s’avance lentement, appuyé sur une canne, vers un siège où il s’effondre (siège qu’il ne quittera pratiquement plus durant les deux heures et demie de set). Rutherford et Banks, en comparaison, semblent de fringants sexagénaires. Nic Collins, le fiston de Phil, s’installe derrière la batterie (où il nous cassera littéralement les oreilles pendant tout le concert, avec son drumming envahissant et sans subtilité, très « années 80 » en fait !). Le fidèle Daryl Stuermer est là aussi, ainsi que deux choristes mâles. Le set démarre sans passer la seconde par un pompeux et interminable Behind The Lines, qui nous rappelle immédiatement pourquoi nous avons toujours trouvé Genesis difficilement écoutable…
Ce qui est rassurant malgré tout, c’est que, en dépit de son apparence physique alarmante, Phil Collins chante encore correctement : sa voix a peu perdu de sa puissance (même si on peut imaginer que la technologie moderne peut servir de béquilles dans ces cas-là), mais elle n’a plus par contre ce timbre singulier qui lui conférant un certain charme. Collins manifeste toutefois une vraie volonté d’animer la soirée, en parlant au public (même un peu en français), et en animant des jeux bon enfants : pour introduire Home by the Sea, on fait tous des bruits de fantômes, et avant Domino, on sera invités à faire du bruit chacun à notre tour pour illustrer la chute successive des dominos – bon, là, ça se sera quand même bien longuet. Sur certains morceaux, il faut remarquer qu’il met pas mal de cœur à l’ouvrage, Phil, en particulier sur Mama, où il deviendrait presque effrayant dans un halo de lumière rouge : même si on est loin de l’intensité originelle, ce sera sans doute d’ailleurs là le meilleur moment de cette looooongue soirée, beaucoup trop tôt dans son déroulement.
Banks reste égal à ce qu’il a toujours été, un claviériste peu inspiré et un artiste totalement apathique, neutre, qui n’esquissera pas un sourire ni ne regardera le public jusqu’au salut final. Rutherford a très bien vieilli, et a maintenant une belle allure distinguée de british gentleman, qui fait de lui le centre de l’attention. Techniquement, le set est impeccable, avec un son tout à fait correct (tout au moins pour nous dans les premiers rangs) qui fait mentir la mauvaise réputation de la salle, et surtout un excellent show vidéo combinant de belles prises de vues des musiciens et des clips d’animation très réussis (comme sur Land of Confusion, chanson dont Phil dira qu’elle est à nouveau de circonstances avec la guerre en Ukraine).
Très honnêtement, il faut bien que les vidéos nous distraient un peu pour supporter un interminable ventre mou du concert, durant lequel il est très difficile d’éviter de piquer un petit roupillon, tant ce qu’on entend est creux, sans relief ni intensité. On n’est pas encore au Musée Grévin, mais, pour reprendre le thème de la tournée, on n’est plus très loin du cimetière (pour le groupe, car nous souhaitons bien évidemment une longue et heureuse existence aux musiciens !).
La setlist ne présente aucune surprise, puisque Genesis non seulement ne la change pas (ou très peu ?) chaque soir, mais a eu en plus l’idée « originale » de publier un album de compilation, The Last Domino?, qui la présente dans son intégralité et dans l’ordre ! Pas de surprise ? Si, quand même, et c’est une sacrée déception : la plupart des morceaux survivants de la très belle période progressive du groupe, donc de l’époque Peter Gabriel (The Cinema Show, The Lamb Lies Down on Broadway, Firth of Fifth, Dancing With the Moonlit Knight…) sont réduit à de bref extraits, presque des « snipets » comme on dit en anglais ! De quoi accentuer encore notre frustration. Seules exceptions : I Know What I Like (In Your Wardrobe) qui aura droit au contraire à une version étendue (un peu trop même), et en rappel, un The Carpet Crawlers (privé quand même de son premier couplet, nous semble-t-il) où l’émotion s’invite enfin dans la soirée. Vraiment in extremis !
Il est un peu plus de 23h, et près de 40.000 personnes se déversent sur la dalle glaciale de la Défense : beaucoup de gens ont l’air heureux avec leurs t-shirts et leurs posters, et on aimerait partager leur plaisir, mais, honnêtement, ce soir, ce n’était pas possible : même ce que les fans qualifient de « tubes mythiques » comme Invisible Touch ou I Can’t Dance n’ont pas vraiment réussi ni à nous toucher ni à nous faire danser.
Quand on a la chance d’avoir vécu l’explosion fantastique de Genesis à l’époque de Foxtrot, avec un Peter Gabriel vêtu d’une robe rouge et portant un masque de renard sur la scène du Bataclan, on ne peut que se sentir affreusement tristes devant ce lugubre et faiblard dernier adieu, 50 ans plus tard.
Texte et photos : Eric Debarnot
Bonjour,
Quel est l’intérêt de voir Genesis en 2022 ? AUCUN ! Ce groupe est sans intérêt artistiquement depuis 40 ans. D’autre part le guitariste s’appelle Daryl Stuermer et non Struermer.
Salutation.
Bonjour
Avez vous vu ou pas Genesis avec Peter Gabriel au Bataclan en 1973 ?
Malheureusement, j’avais 16 ans à l’époque et j’habitais en Province, par contre j’avais vu la retransmission d’une partie du concert à la télévision à l’époque, et ça reste un souvenir marquant de mon adolescence.
Eric