Isolée un bon moment du monde du fait de la pandémie, la Nouvelle Zélande est un pays suffisamment ouvert pour que ses groupes aient continuer à respirer et trouver l’inspiration. Le nouvel album de Mild Orange en témoigne !
On a désormais un peu de mal à s’enthousiasmer quand un groupe ou un artiste débarque avec une étiquette indie rock ou indie pop, tant ce sont des concepts usés et plus vraiment pertinents de nos jours où la musique est beaucoup plus protéiforme. Le fait néanmoins que Mild Orange soit originaire de Nouvelle-Zélande, et de Dunedin en particulier (l’une des capitales mondiales de la pop, à notre avis), change clairement la donne. Quelques écoutes attentives de Looking for Space, le troisième album déjà d’un groupe qui n’a bénéficié que de peu de reconnaissance pour l’instant en France, confirme qu’on n’a pas affaire à des gens qui regardent en arrière : Looking for Space, comme son nom l’indique, est un album où toutes les fenêtres sont ouvertes sur le monde… Le vrai monde, celui de la nature, des saisons, qui ont marqué l’enregistrement de ces chansons durant la longue période d’isolement de la Nouvelle-Zélande du fait du Covid.
Une chanson comme l’accrocheuse F.E.A.R. prouve que le groupe sait aussi composer des chansons pop, directes, séduisantes. Mais les guitares, comme sur le très beau The Time of Our Lives, évoquent avant tout le shoegazing à la manière d’un Slowdive, mais dans une ambiance plus légère, plus flottante encore, qui justifie qu’on utilise souvent le terme de dream pop à propos de Mild Orange. Ce qui est amusant parce que les critiques parlent aussi beaucoup d’incandescence à propos du groupe : alors « mild orange » = « incandescence rêveuse » ? Peu importe, car finalement, ce qu’on ressent fortement en écoutant l’album, c’est un sentiment (très néo-zélandais ?) d’une musique qui intègre la splendeur, la liberté et l’espace de paysages sauvages.
https://youtu.be/Mg6mHXloQMs
Soyons réalistes, par contre, vis-à-vis des textes des chansons : ce n’est pas là la grande force de Mild Orange. Ce qui ne veut pas dire que Looking for Space n’ait pas quelques choses fortes, importantes, même, à dire : par exemple sur la naïveté dont nous faisons preuve lorsque nous sommes amoureux (« Count on light / Count on love / But don’t always believe / All that you’ve seen », soit « Compte sur la lumière / Compte sur l’amour / Mais ne crois pas toujours / Tout ce que tu as vu », sur Colourise), ou sur les polémiques agressives entre gens peu instruits et peu tolérants sur le réseaux sociaux (« Don’t tell me / « That’s the way it is » / How’s that constructive? / Ignorance ain’t bliss » : « Ne me dis pas / « C’est comme ça » / En quoi c’est constructif ? / L’ignorance n’est pas le bonheur » sur What’s Your Fire?). Justement, What’s Your Fire? est la chanson que le groupe brandit en étendard de cet album, utilisant la complexité et l’ambiguïté de son thème pour défier l’auditeur de trouver sa propre voie (et sa propre voix) dans la complexité du monde. De quoi nous convaincre que, même avec des paroles simples, Mild Orange a des choses à dire.
Mais le titre le plus réellement… incandescent s’appelle Music. (avec un point final !) : les guitares propulsent la chanson vers un Rock plus tellurique, et on rêve de le voir joué sur scène, pour comprendre comment Mild Orange peut encore se transcender.
« But don’t let the music stop / Or you’ll go insane » : Mais ne laissez pas la musique s’arrêter / Ou vous deviendrez fous !!
Eric Debarnot