Un ensemble de musiciens slovènes construit un univers musical à la croisée des chemins folk, traditionnel, jazz et world. Des influences multiples pour une identité forte. Le trio Širom invite à un voyage intérieur et sollicite les émotions profondes et authentiques des auditeurs. Une expérience autant musicale que psychédélique.
Ce n’est pas tous les jours que l’on peut se targuer de se mettre entre les oreilles de la musique slovène qui ne soit pas une pop music insipide et réchauffée semblable à tout ce qui se fait un peu partout. L’album « The Liquified Throne of Simplicity » ne ressemble à rien de ce qui existe actuellement. Avec des racines du côté de la musique expérimentale du Art Ensemble of Chicago, tout autant que de la musique folk des années 60 le trio Širom intègre une diversité impressionnante d’instruments qui confère une identité unique. Composé de Iztok Koren, d’Ana Kravanja et de Samo Kutin, le trio n’en est pas à son coup d’essai. Cet album est le 4ème du groupe. Il est édité par tak :til, un label de Glitterbeat qui se concentre depuis quelques années sur des musiques mondiales exigeantes. On y trouve Jon Hassell (USA), Laraaji (USA) ou encore Park Jiha (Corée du Sud)….et désormais donc širom.
Avec 5 morceaux à la durée aussi longue que leur titre respectif, « Wilted superstition Engaged in Copulation », « Grazes, Wrinkles, Drifts into Sleep », ou encore « Prods the Fire with a Bone, Rolls over with a Snake ». le trio décide délibérément de se défaire des conventions et des productions formatées. 80 minutes de musique principalement acoustique exécutée sur des instruments plus originaux les uns que les autres, voila pour le positionnement artistique.
Aucune place pour la demi-mesure et la tempérance. The Liquified Throne of Simplicity est un manifeste artistique autant qu’une catharsis de l’ensemble. Le tour de force réside dans la facilité avec laquelle le trio réussit à embarquer avec lui les auditeurs. Ce qui pourrait paraitre un cheminement intime, personnel, une voie de reconstruction après ces années de pandémie, devient une œuvre de ralliement, un souffle fédérateur émanant non pas de trois musiciens talentueux mais du plus profond de l’âme humaine.
Lorsqu’on leur demande de décrire leur musique, Iztok Koren répond avec malice qu’il pourrait s’agir de musique traditionnelle sans racines géographiques, mais plutôt avec des origines purement mentales. Il ne fait aucun doute que l’ensemble des compositions revêt un aspect répétitif à l’instar des mantras, propice à la méditation.
S’il convient de se placer en conscience dans une disposition d’esprit particulière pour s’engager dans le sillon que Širom creuse devant nous, notre curiosité sera récompensée à coup sûr par les sonorités inédites que le trio a été capable d’assembler sur ses 5 titres. A eux 3, les musiciens mobilisent et jouent plus d’une douzaine d’instruments tantôt caractéristiques d’un style de musique (le daf, grand tambour persan, ou le banjo à trois cordes) tantôt fabriqués de toute pièce par l’un ou l’autre des artistes.
Les raisons ne manquent donc pas pour se lancer entrainer dans les pérégrinations mentales du trio slovène.
Nicolas Duquenne