Le troisième tome de Bug de Enki Bilal laisse le suspense intact, car l’intrigue avance peu, mais c’est toujours aussi beau.
Dans un futur proche, le « very big bug » a effacé l’ensemble des mémoires numériques. Instantanément, le monde moderne s’est effondré. Enki Bilal actualise Ravage, le bestseller de René Barjavel paru en 1943. Il s’amuse à imaginer, sans jamais les développer, les inévitables conséquences sociales, politiques et économiques de ce « very big reset ». Les États les plus puissants et les plus vastes sont les premiers à retourner à la barbarie, les GAFAM regagnent le néant, les richissimes et, hier encore, quasi-immortels transhumains s’affolent et meurent, les bourgeois se terrent et les migrations s’inversent. Les premiers seront-ils les derniers ? Les peurs et le chaos s’installant, les mafias et les sociétés secrètes se multiplient et s’enhardissent.
L’humanité conserve néanmoins une petite chance. Kameron Obb, un avatar de Nikopol, a mystérieusement hérité des données perdues. Lui seul pourrait « redémarrer » le monde.
Bilal prend son temps pour développer son intrigue, qui semble désormais privilégier une origine extra-terrestre. Il musarde et accumule les personnages secondaires, multipliant les belles femmes fortes aux visages émaciés, des femmes présidentes, néo-tsarines, leaders révolutionnaires ou, plus simplement, médecins, qui toutes tentent de mettre la main sur un héros qui s’avère insaisissable.
Le dessin en couleurs directes est toujours aussi beau et froid. Nous retrouvons ses hantises habituelles, la couleur bleu, l’armement soviétique, les bombes inexplosées, les vues aériennes et les crashs d’avion. Ces personnages sourient peu et bougent encore moins. Mais, c’est très beau.
La série est annoncée en 5 tomes, le temps presse, Bilal aura-t-il le temps de boucler toutes ces histoires ?
Stéphane de Boysson