Nous sommes allés un peu à reculons à ce concert de Miles Kane à l’Olympia, mais nous en sommes ressortis, comme tout le monde, enchantés, et reprenant en chœur le refrain symbolique de Don’t Forget Who You Are… Récit d’une soirée étonnante…
Quatre ans qu’on n’avait pas vu Miles Kane, notre ex-petite idole, sur scène. Et il faut bien avouer qu’il ne nous avait pas manqué tant que ça : depuis un set pas très intéressant avec les Last Shadow Puppets à Rock en Seine en 2016 et un passage à la Cigale ridiculement court en 2018, on n’avait plus très envie de lui être aussi fidèle. Et puis, comme il ne faut jamais dire jamais, voilà que l’ex-ami Miles nous sortait en janvier un nouvel album chaleureux et festif, rempli de soul… qui nous a bien donné envie d’être là à l’Olympia ce soir.
20h10 : on ne savait pas à quoi s’attendre avec Oracle Sisters… Deux jeunes hommes montent sur scène pour nous interpréter un joli duo folk, avec deux voix impeccables. On tend l’oreille, quand deux filles les rejoignent alors pour le second morceau : l’une s’installe aux claviers et l’autre remplace l’un des chanteurs qui s’assied, lui, à la batterie, pour un morceau vaguement bossa. Ah bien joué, cette intro trompeuse ! Mais non, c’est l’inverse, la chanteuse prend alors… la batterie, et revoilà nos deux chanteurs au premier plan, rejoints par un bassiste et un autre guitariste, pour un morceau rock très Californien 70s, qui se termine par un beau solo… du guitariste… qui ne fait, semble-t-il, pas partie du groupe et quitte la scène. On ne sait plus trop sur quel pied danser, mais au moins on danse : les chansons sont pop et fun, dans un registres Beatles – Bee Gees qui peut aussi rappeler par instants ce que font les Lemon Twigs. Au bout d’un moment, l’organiste se renverse une bouteille d’eau sur la tête et vient ensuite s’ébrouer sur le premier rang, puis sur les autres musiciens. Ok… Le set se termine dans un registre enlevé et avec de belles parties de guitare. Bref, on n’a aucune idée de ce que l’on vient d’écouter, mais c’était drôle, frais et bien fait mélodiquement. Le public a majoritairement apprécié, même si ce genre de fantaisie à la fois bon enfant et rétro n’est certainement pas du goût de tout le monde : certains de nos amis ont trouvé ça ennuyeux. A revoir pour clarifier nos idées sur cette troupe un peu étrange…
21h10 : Miles Kane n’a pas complètement changé depuis la dernière fois qu’on l’a vu, même s’il a laissé tomber les paillettes glam : si son dernier album, Change the Show, démontrait un retour à la simplicité, il a gardé sa « frime californienne », il roule toujours les mécaniques et nous offre le genre de show maximaliste que, d’une certaine manière, des générations successives de jeunes musiciens anglais ont essayé de faire disparaître depuis la fin des années 70. Oui, en dépit des racines très british de cette musique, c’est du Rock à l’américaine, pas si loin de Las Vegas : son et lumières au top, groupe hyper efficace, postures emblématiques et tout et tout.
On a peur de trouver ça détestable, honnêtement… mais Miles Kane a une martingale : des chansons impeccables, qu’il assemble désormais en une setlist tout terrain. Rock’n’roll, soul, groove, pop, rythm and blues, glam, tout rentre sans problème dans cette énorme marmite bouillonnante. Et on a beau essayer de résister, l’enthousiasme communicatif du public et la, oui la générosité du groupe font que nos dernières barrières s’effondrent vite et que, au bout d’une demi-heure de concert, on se joint de tout cœur aux fans – majoritairement féminines ce soir – pour reprendre les refrains des chansons.
Et il faut aussi reconnaître que, plus le set avance, moins Miles… en fait trop ! C’est quand, avec l’aide de Oracle Sisters conviés à le rejoindre, il chante une version « by the book » du Dont let me down de John Lennon qu’on reconnaît, derrière les années et le professionnalisme, le très jeune musicien liverpuldien enthousiaste que nous avions découvert avec ses Rascals à la Maro un jour de décembre 2008. De toute façon, depuis la version puissante de Inhaler que Kane nous a offerte, et dont tout le monde a repris le refrain en chœur, nous n’avons plus d’esprit critique…
La dernière demi-heure du concert va s’avérer tout simplement parfaite, avec un Don’t Forget Who You Are repris par le public qui devient d’un coup emblématique : c’est là le message parfait, sur un refrain accrocheur que s’envoie Miles Kane, et qu’il nous envoie par la même occasion, non ? Le Standing Next to Me des Last Shadow Puppets est parfait, ainsi que, en rappel, la version qui tue de Come Closer, clôturant un set qui, en dépit de ses excès, pourrait bien être le meilleur que nous ayons pu voir de Miles depuis ses débuts.
Sur les marches à la sortie de la salle, en face du bar, tout le monde s’est arrêté pour chanter ensemble, dans un élan de joie qui nous a rappelé pourquoi nous assistions – réellement – à des concerts, le refrain de Don’t Forget Who You Are. C’était très beau, et même si l’Olympia n’était pas totalement complète ce soir, il nous semble que nous avons assisté à l’avènement d’une mini-rock star populaire. Quoi que ce soit que ça signifie…
Texte : Eric Debarnot
Photos : Robert Gil