Après l’excellente première soirée du Festival Culture Box, il faut bien reconnaître que toutes les promesses d’une affiche alléchante n’ont pas été tenues hier soir au Cirque d’Hiver, et que c’est Balthazar qui a sauvé la nuit en nous faisant danser et fondre de plaisir.
Seconde soirée du Festival, a priori plus consensuelle que la première, avec deux groupes aussi « populaires » que Wet Leg – grosse excitation dans la presse française – et Balthazar, nos Belges soul. C’est à la première partie, l’Irlandaise Sinead O’Brien, que revient le rôle de représenter le rock d’avant-garde ce soir, et on l’attend avec impatience, vu les bonnes choses qu’en dit la presse anglaise.
19h30 : Sinead O’Brien est une belle jeune femme, élégamment vêtue de vert, qui récite de la poésie, accompagnée sur scène ce soir par deux musiciens – un guitariste et un batteur. Elle revendique une inspiration poétique et littéraire classique (Yeats, Camus, ce genre de choses), et on est forcément intrigué par ce parti pris parlé-chanté, et par une ambition littéraire très inhabituelle dans le Rock. Et le spectre de Patti Smith – heureusement toujours là – devrait normalement venir hanter le set… Et puis non, en fait : là où la grande Patti avait une présence scénique impressionnante, la jeune femme manque trop de charisme pour imposer ses textes. Mais le plus gros problème, vite évident, est que tous les morceaux sonnent de la même façon, et que plus le set avance, plus l’ennui nous gagne. On a un peu honte de dire ça, mais faute de comprendre suffisamment les textes, il est difficile de s’accrocher à quoi que ce soit de consistant. La musique « d’accompagnement » n’est pas inintéressante, elle ne manque pas parfois de vigueur, mais cette impression de n’avoir affaire qu’à un seul et interminable même texte récité plombe vite l’ambiance. Roupillon garanti !
20h30 : on est avant tout venu pour Wet Leg ce soir, mais autant être francs, la déception va être sévère. La faute d’abord à un son très mauvais, le pire des deux jours du festival, qui nous prive la plupart du temps de la voix de Rhyan, ce qui, tout le monde en conviendra, est un problème pour ce genre de musique. En plus, Rhyan a l’air de se moquer complètement du public, avec lequel elle n’aura absolument aucune interaction, et les seuls moments où on la verra un peu sourire seront ceux où elle s’amuse avec sa complice Hester. Il est quand même étonnant de voir un groupe aussi jeune ne manifester aucune envie visible de jouer, de partager leur musique. Ce set de 40 minutes s’avère finalement morne, sans grand relief, ralenti même par quelques compositions assez faibles qui alourdissaient déjà l’album. Les trois derniers titres trouvent l’énergie qui manquait jusqu’alors, mais n’emportent pas complètement notre adhésion : les cris perçants de Rhian sur Ur Mum paraissent artificiels, l’enchaînement avec Angelica souligne surtout sa similitude avec la chanson précédente, et même Chaise Longue ne nous épatera que moyennement ce soir. Demain soir, au Point Éphémère, on verra si Wet Leg rattrape la mauvaise impression créée par ces 40 minutes sans vie…
22h15 : un peu trop d’attente, au-delà du temps normal d’installation du matériel du groupe, avant que Balthazar, un groupe dont on n’espérait plus grand chose, n’investisse la scène. Ils vont pourtant rattraper à eux seuls cette soirée bien mal engagée. En nous offrant une heure d’un concert extrêmement professionnel – trop peut-être même, parce qu’on n’est jamais vraiment contents – et dispensateur de plaisirs raffinés, suaves même… Ces 10 chansons impeccables qu’on doit leur reconnaître, toutes interprétées avec beaucoup de soin, sont souvent étirées pour le plaisir immédiat de la répétition et de la danse, bénéficient de ce supplément d’âme qu’on attend du live : on apprécie les mélodies superbes (Grapefruit, le bouleversant Bunker), les vocaux magistraux, non seulement de Jinte et Maarten mais de tous les musiciens, et l’orchestration toujours sensible et pertinente (avec mention spéciale au trombone de Tijs !). Par contre, on doit constater que Balthazar a fait une croix sur le Rock et délivre désormais un set purement soul tout en subtilité et en retenue. Même le formidable Fever qui mettra le feu au cirque, ne décolle plus comme il le faisait autrefois. Balthazar évolue, on peut aimer ou non leur nouvelle orientation, mais ils étaient hier soir synonymes de plaisir.
A l’année prochaine, Culture Box !
Photos et texte : Eric Debarnot
Wet Leg : du rock, de la pop, de l’effronterie et du sérieux !