Oslo Tropique crache son venin sur un premier album en forme de manifeste. Du hard-rock mélodieux et agressif à la fois. Des chansons énervées. Pour dénoncer un monde qui s’écroule. Un sain rappel que le rock a une fonction sociale et sociétale.
Couplet-refrain-pont, dans cet ordre ou dans un autre, pour les 12 morceaux qui composent cet album d’Oslo Tropique. 12 morceaux joués par un combo guitare-basse-batterie-voix. Du classique! Oui et non, peut-être (vous trouverez la réponse plus bas). Et quand bien même, pourquoi serait-ce un défaut? Après tout, c’est toujours avec les vieilles recettes qu’on cuisine la meilleure tambouille. Et, Entre Les Mains Des Robots est bon, vraiment! Une musique qui tend vers ce qu’on peut encore appeler le hard-rock, mais qui existe assez peu sous cette dénomination tant le genre s’est diversifié… Une basse lourde. Une batterie métronomique et omniprésente. Des guitares en riff, solos et accompagnement qui déchirent. Des morceaux menés au pas de course, sur un rythme frénétique. Oslo Tropique laisse peu d’espace pour respirer vraiment, pour reprendre son souffle. Et ça dure 45 minutes.
On aurait tort d’oublie la voix. Si Oslo Tropique réussit assez rapidement à nous séduire et à nous balader jusqu’au bout de l’album, ce n’est pas seulement grâce à une musique efficace. Le chant joue un rôle essentiel dans l’atmosphère qui se dégage de l’album. D’abord, parce que les mélodies sont excellentes, addictives, prenantes. Vous verrez, elles se feront facilement leur place dans votre oreille. Et puis parce que ces mélodies sont superbement chantées… Le chanteur feule, miaule, mais surtout crie, gueule, hurle sa peur, son angoisse même, sa colère, sa haine. La haine d’habiter dans une jungle (La Jungle), de n’être plus « qu’un détritus, un sachet de plus » (Les Camions Bennes). La colère de vivre dans un monde ridicule, pathétique dans lequel “Bernard-Henri Levy se branle sur Tripoli” (Les Chaînes Info), et l’espoir de voir les mouettes a disparu puisqu’ “aucun terminus ne mène à la mer” (Aucun terminus). Que faire? S’ennuyer au mieux, « comme un rat mort, j’aimerai tant saigner quelque part” (L’amour et ses fantômes). Se laisser aller, désespéré—“la nuit je m’en fous, je roule comme un fou, j’roule comme un fou, je bois comme un trou sans fond” (Nuits Verticales). Et rien n’échappe à ce désespoir… même pas l’amour (évidemment!). Barbara et L’amour Et Ses Fantômes sont glauques et oppressantes. Comment vivre l’amour en temps de guerre, quand les enfants crient et que tombent les bombes, en période de répression policière… « des lumières rouges et jaunes (qui) filent un drôle de cafard » (L’amour Et Ses Fantômes).
Évidemment, on ne peut pas ne pas penser à Trust, si on doit ne citer qu’un nom autant que ce soit celui-ci ! Une musique de l’urgence et de la rage. Oslo Tropique nous rappelle que si le rock a quelque chose à dire, c’est peut-être de cette façon, en produisant une musique engagée, une critique de la société. Classique, donc, Oslo Tropique peut-être mais parce que le groupe assume une tradition ! Important.
Alain Marciano