Pauline Dreyfus constitue une galerie de personnage savoureux et nous replonge dans les années Giscard pour se souvenir de « l’affaire des diamants de Bokassa ». Un roman en forme de comédie sociale, drôle et pétillant.
Alors que Valéry Giscard d’Estaing connaît une présidence plutôt tranquille, une affaire va quelque peu entacher son image et lui faire perdre petit à petit le crédit qu’il avait auprès des Français. En 1979, suite à une révélation du Canard enchaîné, le président de la république alors en fonction est accusé d’avoir reçu de la part de l’empereur Bokassa des diamants d’une grande valeur. Plutôt que de démentir immédiatement les rumeurs, Valéry Giscard d’Estaing décide de s’enfermer dans le silence durant 49 jours… c’est le temps que dure le roman imaginé par Pauline Dreyfus dans lequel elle dresse le portrait de diverses personnalités, hommes et femmes issus de divers milieux qui tous ont pour point commun de s’interroger sur ce mutisme et sur cette mystérieuse affaire des diamants.
Au fil des chapitres, on va faire la connaissance d’un agent des Renseignements Généraux, d’une journaliste aux dents longues qui cherche le scoop auprès de deux danseurs dissidents russes, mais également d’une immigré portugaise, d’un habitué des nuits parisiennes, d’un chef du protocole de l’Elysée, d’une militante féministe ou encore d’un chômeur. L’occasion pour le lecteur de se replonger dans cette France giscardienne des années 70, de se souvenir d’un président qui se voulait jeune et moderne, et dont l’état de grâce durera quelques années, avant que quelques sales affaires viennent entacher son mandat, notamment L’affaire Boulin, dont il est question dans le livre, et donc cette fameuse affaire des diamants.
Dans une construction très habile, Pauline Dreyfus tisse un récit choral dans lequel les personnages se passent – pour ainsi dire – le relais à chaque changement de chapitre pour former au final une grande assemblée qui attend patiemment les explications du président à la télévision. En attendant, on parle, on suppute, on fantasme, on critique ou on loue ce président au-dessus de tout soupçon dans cette « France apaisée » comme le dit Giscard, où les notables invitent à leur table ces 50 français désignés par le Nouvel Observateur comme représentant l’avenir de la France.
Dans un style pétillant, plein de rythme, qui rappelle, par son humour et son ironie, les livres les plus récents de Pierre Lemaître, l’auteure de Immortel (2013) et Paul Morand nous offre un roman plein de nostalgie légère et de clins d’œil à une époque bien lointaine où une affaire pouvait vous tenir en haleine un pays tout entier durant plusieurs semaines.
Benoit RICHARD