Monolithe Noir – Rin : un album riche de nuances organiques

Pour son troisième album, Antoine Pasqualini et ses deux comparses de Monolithe Noir proposent des musiques sous influences bretonnes aux sonorités analogiques et électroniques. Un album qui va prendre toute sa dimension sur scène.

Monolithe_Noir
© Victor Pattyn

Antoine Pasqualini fondateur de Monolithe Noir avait déjà deux albums à son actif : Le son Grave sorti en 2017 et Moira en 2020. Pour Rin , le 3ème album, Yannick Dupont (membre de Yokai, aux cotés notamment de Clément Nourry du groupe Under the Reefs Orchestra) vient prêter main forte tant à la composition, l’interprétation, l’enregistrement qu’à la performance sur scène. Tous deux batteurs de formation mais également multi-instrumentistes, se partagent les claviers, les guitares et les basses sur les différents morceaux de l’album résolument plus acoustique que les précédents.

En effet, l’ensemble des mélodies est porté par ces instruments conférant une texture chaude dont le traitement analogique contraste avec les séquences électroniques programmées du son grave et de Moira. Composé principalement durant le confinement, Rin, est volontairement tourné vers la performance scénique et vers la rencontre avec le public tenu si longtemps éloigné des lieux de concert.
Parcourir chaque titre de l’album permet de prendre la mesure du fabuleux travail effectué par le duo. Balafenn, titre inaugural de l’album revendique la filiation avec la drone music des albums précédents. Finvus fait la part belle à la batterie, mais ne rechigne pas à faire transparaitre des influences rock progressif voire krautrock. Rin, Balafenn, Finvus, trois mots de langue bretonne – et il y en aura d’autres tout au long de l’album – pourraient nous conduire à rechercher une grille d’écoute proche de la musique traditionnelle. Ce serait pourtant mal connaitre Monolithe noir et sa désarçonnante façon de métamorphoser les sons et de fusionner les influences.

La présence de la vielle à roue sur quelques titres revendique cependant cette appartenance. Antoine Pasqualini, originaire de Brest, a construit lui-même cet instrument emblématique de nombreuses musiques dites traditionnelles. Il permet les bourdons, c’est-à-dire la tenue d’un accord en continu tout en conservant la possibilité de jouer d’autres sons en même temps. Il est intéressant de remarquer que ce « bourdon continu » traduit en anglais correspond à la « drone music », style de musique Ambient qui qualifie assez fidèlement les compositions de Monolithe noir.

Pour autant Barra Bouge, titre probablement le plus marquant de l’album, se distingue par la voix puissante et les paroles en arabe tunisien de Jawhar, un artiste et un collectif bruxellois qui a sorti plusieurs albums particulièrement intéressants. Accompagnée par la talentueuse Mirabelle Gilis – qui a travaillé avec Miossec et Rachid Taha – au violon, ce titre placé en fin d’album (8ème piste) énergétise l’auditeur et le projette vers les 2 derniers morceaux.
L’album se termine par le très réussi Viellism tel un crescendo final à cet ensemble excessivement cohérent de dix compositions. Tel un Da Capo également, puisqu’à peine achevée cette dernière piste, l’envie de replacer le disque sur la face A est irrésistible.

La très belle peinture de la pochette illustre ces frontières mouvantes, ces zones d’ombres sitôt éclairées pour s’effacer de nouveau. Le monolithe n’est certainement pas que noir, il est en revanche toujours aussi mystérieux.

Nicolas Duquenne

Monolithe Noir – Rin
Label : Capitane Records / Humpty Dumpty
Date de Parution : 26 août 2022