Même s’il n’est pas totalement réussi, le Visiteur du Futur reste, en dépit de ses maladresses, une bonne raison de croire au développement du cinéma de genre en France…
L’arrivée du Visiteur du futur dans les salles de cinéma est, avant même son visionnage, un événement réjouissant : c’est l’aboutissement d’un parcours pour un créateur autodidacte ayant commencé, sans aucun moyen une web série d’épisodes de moins de deux minutes il y a 13 ans, et dont le projet a progressivement gagné en ampleur. Alors que l’heure est plutôt à la morosité dans les salles, on ne peut que saluer et accompagner cette initiative, surtout lorsqu’il s’agit de tenter de proposer une science-fiction à la française.
Autant de précautions oratoires qui cherchent à susciter l’indulgence : Le Visiteur du futur est un film qu’on a envie de ménager, même si l’on ne peut fermer les yeux sur un gros lot de ses maladresses. L’exposition très laborieuse et à l’humour bancal d’un trio d’activistes soulève les plus grandes réticences quant à l’écriture à venir, qui, gagnera heureusement en efficacité par la suite. Le récit a l’avantage de ne pas perdre les néophytes, tout en multipliant certains sous-entendus à une narration plus vaste qui confère une belle épaisseur à l’univers présenté. L’intrigue reste cependant d’une banalité assez frustrante, combinant les liens père-fille aux questions capitalistes et écologiques, pour des enjeux relativement sommaires et, surtout, terriblement prévisibles.
C’est d’ailleurs l’un des points les plus déstabilisants du film que cette façon presque simpliste de s’emparer de tous les poncifs du genre : François Descraques assume parfaitement la simplicité de son dispositif, au non d’un cinéma généreux et populaire, et l’on devra garder à l’esprit ce parti pris pour accepter un résultat un peu naïf, voire vintage. Les décors, costumes et différents groupes de personnages semblent à appartenir aux blockbusters à l’ancienne des années 80, jusqu’au groupe des enfants qui rappelle La Cité des enfants perdus ou, pire encore, le Hook de Steven Spielberg. Le charme pourra opérer pour les nostalgiques, ce qui est moins évident pour la nouvelle génération qui risque de se trouver déconcerté par cette patine vintage sans doute aussi due au manque de moyens. Cette approche se retrouve aussi dans la mise en scène, qui semble toujours soucieuse de saupoudrer son action d’un gratin (musique, ralentis, lens flare) censé l’enrichir, sans toujours atteindre son objectif. L’approche comique et parodique viendra peut-être cueillir le public contemporain, même si les caméos à répétition, assez amusants dans le prologue avec McFly et Carlito, se résument pour la plupart à des apparitions de quelques secondes, suffisantes pour qu’on colle des célébrités sur une affiche.
Les obstacles étaient donc nombreux, tout comme les opportunités de faire sombrer l’édifice. Il s’avère pourtant que le cap est maintenu, et gagne même en assurance à mesure que le récit se déploie : si l’on est toujours aussi peu intéressés par les enjeux généraux (et dubitatifs sur ces voyages temporels, qui donnent la possibilité aux protagonistes de tout simplement annuler le scénario qui se déroule sous nos yeux), les personnages gagnent en présence et le comique parvient à faire mouche parmi les personnages historiques de la série. L’action se fluidifie, et la narration, sur un dernier segment à trois récits alternés, gagne elle aussi en efficacité. À se demander si un deuxième volet, que l’épilogue appelle clairement de ses vœux, ne verrait pas l’équipe en pleine possession de ses moyens. C’est tout ce qu’on peut lui souhaiter, à elle comme au cinéma de genre sur le territoire national.
Sergent Pepper