Avec A Round of Applause, le groupe californien Hooveriii nous propose probablement son meilleur album. De belles chansons, maîtrisées et bien construites autour de mélodies imparables, portées par une rythmique omniprésente et illuminées par des guitares qui tricotent sans arrêt ! Énergie et puissance, flamboyance et majesté — voilà ce qui résume A Round of Applause.
Hoover three : le groupe dont le nom s’écrit hooveriii ! Les « i » à la fin du nom sont là pour signifier un nombre. Ils ne font pas référence à l’enthousiasme frénétique qu’éprouverait le public à l’entrée sur scène de Bert Hoover (chant et guitare, le fondateur du groupe) Gabe Flores (guitare et voix), Kaz Mirblouk (basse et synthés), James Novick (synthés), et Owen Barrett (batterie). Cela aurait pu, tant la musique produite par ces 5 musiciens est enthousiasmante ou, au moins, enthousiaste. Énergie flamboyante, furia, puissance. Mais aussi une grande force mélodique, des chansons qui vous rentrent extrêmement facilement dans la tête et qui y restent. On a envie d’y revenir, de remettre le vinyle sur la platine pour pouvoir profiter encore de cette force musicale.
C’était déjà ce qu’on aurait pu dire de l’avant-dernier album du groupe, l’éponyme Hooveriii (2018). Tout l’album était très très bon, avec une mention particulière (peut-être) pour les derniers morceaux, Electric Eyes (génial morceau, sans hésitation), Head-Squeeze et Mudd. Un album puissant, porté par ces solos de guitares et ses rythmiques marquées, mais aussi par des mélodies assez imparables. C’est aussi ce qu’on aurait pu dire de Water For The Frogs (2021), dans un genre différent, avec moins de morceaux plus longs, plus kraut, était très bon. Un peu plus foutraque, plus inégal – les goûts et les couleurs… – mais avec des morceaux vraiment excellents (comme Hang Em’ High, qui a un côté opéra rock des sixties). Mais le groupe avait eu un peu tendance à trop en faire, avec quelques morceaux un peu longs… comme Gone et ses presque 10 minutes de ce qui ressemblait à une improvisation sur un thème krautrock.
https://www.youtube.com/watch?v=-Wbt-lBGMDA
Une des caractéristiques que partageaient ces deux albums tenait à la manière dont la voix de Bert Hoover était ou plutôt n’était pas mise en avant. Mixée en arrière, loin derrière les instruments. Cela change avec A round of applause, le second album d’Hooveriii pour The Reverberation Appreciation Society (le label d’Austin, Texas, qui organise le festival LEVITATION). La voix change suffisamment pour que les morceaux prennent une autre dimension. La musique semble faire plus place au chant, qui arrive toujours (souvent disons) au milieu d’une explosion sonore, après des intros furieuses et emballées pour calmer le rythme – écoutez Water Lilly ou ce qui est probablement un des meilleurs morceaux de l’album, Stone men. Bert Hoover ne crie pas pour se faire entendre. Il sait chanter. Il le fait bien. Et puis il chante toujours des chansons qui sont extrêmement mélodiques (à l’exception, bien évidemment, du seul instrumental de l’album). C’est probablement sur The Pearl que cela s’entend le mieux – après une intro qui semble être celle de Dreamer de Supertramp, le morceau part dans une sorte de délire sixties à la Beach Boys !
Ah ces références utilisées pour qualifier et parler de la musique de Hoveriii ! On en trouve tellement : de David Bowie et Iggy Pop à Peter Hammill, en passant par les 13th Floor Elevators, les Flaming Lips et Bryan Ferry. Alors pourquoi ne pas en rajouter d’autres ? On pourrait presque rajouter Animal Collective pour le côté délirant et déjanté… Ce qui est très vrai, c’est qu’écouter Hooveriii donne l’impression de faire un voyage dans le monde de la pop et du rock. On entend quelque chose dont on se dit qu’on l’a déjà entendu ailleurs mais où… un peu partout en fait. Un groupe qui fait une sorte de synthèse endiablée de ce qu’on a entendu depuis des décennies, et réussit à en sortir quelque chose de frais, original, intéressant. Parce que c’est quand même vrai que cet album est une grande réussite. Aussi bon que Hooveriii, plus homogène (bien meilleur quand même) que Water For The Frogs. Aucun morceau n’est faiblard. Water Lilly et Stone Men, Time-The Outlaw sont grandioses : des mélodies imparables, une rythmique épuisante. Iguana, son sax et Bert Hoover chante comme Bryan Ferry. Et à chaque fois ce qu’il faut de synthés seventies pour donner à la musique un côté aérien…
Alain Marciano