On attendait leur retour depuis un bon moment, et Petit Bain était bondé pour accueillir les Norvégiens de Madrugada, qui nous ont livré un set généreux mais manquant finalement d’intensité et de folie.
S’appeler Madrugada quand on est norvégien, c’était le genre de choses à la mode à la fin des années 90 et au début des années 2000, quand Of Montreal venait d’Athens et I’m from Barcelona de Jönköping en Suède. On rêve forcément d’un groupe portugais ou espagnol qui s’appelle Tidlig Morgen, mais bon, foin de considérations oiseuses, le public de Madrugada est nombreux et passionné : tout le monde est arrivé deux heures à l’avance au moins, créant une queue d’une improbable longueur sur la berge de la Seine : c’est presque du jamais vu ! Et c’est rassurant de voir un tel engouement pour un groupe d’indie rock.
21h20 : c’est un horaire un peu tardif pour un groupe comme Madrugada, dont les sets dépassent normalement les deux heures. Only when you’re Gone est une entrée en matière parfaitement posée : la voix de Sivert Høyem, magnifique, est en avant, puis c’est la montée en puissance, avec les guitares qui, finalement, partent à l’assaut… Tout Madrugada résumé en moins de 5 minutes. Sivert serre déjà des mains au premier rang, on est – alors que la salle est bondée – entre amis. If I was the Captain fait souffler le vent du large, mais c’est le superbe Look Away Lucifer qui a réellement des allures de chanson de marins, qui se terminerait presque en orage rock’n’roll. Presque… Et c’est ce presque dont on entrevoit qu’il va constituer la limite d’un concert pourtant très beau.
Sivert abandonne temporairement sa guitare acoustique, tombe la veste et s’empare d’un tambourin : sur le rampant Hands Up et – encore une fois – sa longue ascension vers une explosion qui n’adviendra pas, on peut lever les mains ou simplement se laisser bercer par la guitare électrique. « Its a small place but we will take you on a long journey. This is the Last show of a small European tour ! », nous annonce Sivert, avant de nous ramener au tout début du groupe : retour à 1999 avec la valse de Electric, accueilli par des cris de joie.
Nobody Loves you like I do fait enfin chanter les fans sur le refrain, mais sinon, le public reste très concentré, presque recueilli, pour laisserv la voix de Sivert se déployer. Ce calme des spectateurs, inhabituel pour un concert de rock, ne va clairement pas aider Madrugada à faire décoller son set. Sivert raconte, pour introduire Honey Bee, qu’il a été inspiré par Georges Moustaki ! Rires dans la salle… mais qui sommes-nous pour juger ?
Il faut attendre – on approche une heure de set, et le temps commence à paraître un peu long – Black Mambo, puis Bloodshot pour s’approcher de vrais pics d’intensité… mais on reste finalement dans les atmosphères menaçantes. Le public tape dans ses mains avec enthousiasme, et Sivert a revêtu une spectaculaire veste à facettes qui lui tient apparemment très chaud.
Pour nous prouver qu’ils sont un « Everything Band », comme l’aurait affirmé Jagger à propos des Stones, Madrugada reviennent très vite à une ballade avec Majesty, qui se termine en effet avec des « ooh, ooh » stoniens du plus bel effet alors que la guitare part dans un solo que l’on ne peut guère que qualifier de classique. Strange Colour Blue termine le set de 1h30 : voix caverneuse de crooner, reverb sur la guitare, rythmique façon cheval au trot ou bien train traversant la prairie, pendant que Sivert brandit un projecteur qu’il pointe sur la fosse : « Please don’t stop it… ! »
Pas de risque qu’ils arrêtent, les habitués savent que nous aurons droit à un rappel d’au moins une demi-heure… Cependant, le problème est que ce rappel ne monte pas non plus en puissance, on continue dans le même registre d’une beauté intense mais finalement pas assez engageante, trop sage. On redescend même un peu sur un The World Could Be Falling Down qui évoque plus les ballades brumeuses de Chris Isaak qu’un titre expansif couronnant un concert. Le final sera quand même plus fédérateur avec les chœurs du public sur What’s in your mind, la magnifique mélodie de The Kids Are on High Street, avant de se refermer de manière plus intimiste avec Valley of Deception.
Bref, une très belle soirée, dont nous sortirons néanmoins frustrés, le groupe ne tenant jamais complètement ses promesses émotionnelles, et le public étant resté également beaucoup trop sage.
Photos et texte : Eric Debarnot
Un excellent concert! C’était qui la première partie svp? merci
C’était le leader (en solo) d’un groupe français qui s’appelle In My Head. As-tu aimé ?